jueves, 25 de mayo de 2006

RESUMEN TESIS DOCTORAL EN FRANCÉS

"La représentation de la femme de pouvoir dans les arts. Cléopâtre : un exemple pour l'analyse intertextuelle".
Laia Falcón Díaz-Aguado
Université Sorbonne Nouvelle de Paris
Universidad Complutense de Madrid

Table des matières
Présentation
1. Objectifs et hypothèses principales
1.1 Objectifs de la recherche1.2. Formulation des hypothèses
2. Des antécédents théoriques et fondements méthodologiques
2. 1. L’exposé des antécédents théoriques
2.2. Proposition d'un modèle d'analyse du personnage dans l'oeuvre d'art dans une perspective textuelle et sociologique.2.3. L’étude panoramique du personnage, l’analyse approfondie et une nouvelle comparaison.
3. Une étude panoramique. La représentation de Cléopâtre VII dans l'art occidental du Ier siècle av. J.-C. à 2007.
3.1. Les représentations de l'Antiquité. La naissance du double mythe : la leader capable et la courtisane perverse. 3.2. Les résumés historiques du Moyen Âge et la réinterprétation du premier humanisme chrétien : la Cléopâtre pécheresse, le prix du héros et les origines de la reine savante et martyr.
3.3. Les XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles : l'héroïne tragique, le mysticisme amoureux, l'enchanteresse maîtresse de la séduction et la dame-stratège.
3.4. La Cléopâtre fatale de l'univers du XIX siècle.
3.5. L'icône-Cléopâtre : vers le débat de la « superwoman» et le drapeau de revendication sociale.
4. La femme de pouvoir comme une division insoluble : Cleopatra de Cecil B. De Mille (1934).
5. La leader comme une « femme fatale » dans l'opéra Cléopâtre de Jules Massenet et Louis Payen (1912-1914)

6. La femme dirigeante comme une « personne royale». L’analyse de la tragédie Antoine et Cléopâtre de William Shakespeare (1606).
7. Conclusions Bibliographie

Présentation
Certains personnages, habituellement éloignés des questions importantes de notre vie quotidienne, acquièrent cependant une présence très puissante dans les narrations et les images artistiques que nous choisissons pour accompagner notre vie. En apparence, certains d’entre eux ne sembleraient pas représenter une partie importante de notre hérédité philosophique, culturelle ou politique, cependant ils s'installent fortement dans l’imaginaire collectif en faisant que, d’une génération à l’autre, nous les choisissons comme les porteurs des énoncés qui nous définissent comme des individus et des groupes sociaux. Pendant ces dernières années comme doctorante des universités Sorbonne Nouvelle et Complutense, je me suis interrogée sur ces processus artistiques et sociaux appliqués à un cas concret : "La représentation de la femme de pouvoir dans les arts. Cléopâtre : un exemple pour l'analyse intertextuelle". Dans les pages suivantes, nous présentons les lignes principales qui définissent et résument cette investigation : à l'heure de présenter nos travaux d'étude et d'analyse, le document présent recherche la concision, donc nous avons choisi de sacrifier le détail au bénéfice de la synthèse. Le lecteur pourra trouver l'exposé complet et développé de notre travail dans la version originale de la recherche citée.
Cette investigation a été réalisée par la coordination de deux champs disciplinaires : les études de la Communication et la Sociologie de l'Art. Ainsi nous partons d'un double intérêt autour de ce type de personnages évoqués par l'art :
1. approfondir l'analyse de sa construction textuelle : quels sont les recours expressifs et émotifs avec lesquels leurs auteurs les profilent et comment ils sont élaborés;
2. analyser la relation entre ces traits que l'auteur définit pour le personnage et ceux du groupe social spécifique pour lequel il l'a créé.
Orientés par cette double recherche, nous choisissons un type de personnage dont l'analyse nous semblait spécialement intéressante et nécessaire : nous considérons que les personnages qui représentent la femme avec un fort pouvoir social et politique constituent un corpus très important qui réclame l'investigation coordonnée des différentes Sciences Sociales. Ce choix est motivé par les considérations suivantes :
- nous détectons que chaque phase du débat historique autour de la distribution des rôles et responsabilités entre les hommes et les femmes s’interroge : "comment sont-elles, les femmes de pouvoir ?";
- au regard du chapitre historique et social dans lequel nous sommes maintenant, sur le point de finir la première décennie du XXIe siècle, la présence de femmes dans des postes de leadership social, patronal ou politique est plus grande que dans aucune autre période[1], et cette question réapparaît avec une forte insistance dans les divers documents qui témoignent de nos préoccupations et de nos discours;
- la Sociologie, la Psychologie Sociale ou les Sciences de l'Information se rejoignent pour reconnaître l'importance du rôle de l'hérédité culturelle dans cette question collective;
- pour preuve de la reconnaissance internationale de l'importance du sujet, il faut souligner que lors de la « IVe Conférence Mondiale sur les Femmes », organisée par les Nations Unies à Pékin en 1995, on a proposé comme objectif stratégique (J.2) de dépasser les stéréotypes féminins renforcés et diffusés par les récits et les médias, en proposant pour y parvenir des mesures parmi lesquelles :
a) « Renforcer la recherche destinée à promouvoir des images équilibrées des femmes »;
b) « Élaborer des critères et former des experts pour qu'ils appliquent l'analyse de genre aux programmes des médias »;
c) « Produire et/ou diffuser des programmes dans les médias sur des femmes dirigeantes »;
d) « Sensibiliser les médias pour qu'ils s'abstiennent de présenter les femmes comme des êtres inférieurs ».
Afin de poursuivre cet objectif, nous décidons de choisir un motif constant représentatif de ce type de personnage (c'est-à-dire de la femme avec pouvoir politique et social) et d’analyser et comparer les traits et les discours écrits à son propos par les différents groupes sociaux qui l’ont représenté artistiquement. Par rapport à ce choix, nous soulignons deux aspects principaux :
- disposer d'une version de référence qui avait servi aux autres évocations comme la source à partir de laquelle sélectionner ou modifier des traits;
- trouver, parmi les personnages de l'Histoire, une femme-leader qui aurait semblé spécialement attractive aux différentes expressions artistiques et à leurs publics respectifs (situés, en plus, dans des différents contextes sociaux, contrastants dans le temps et l'espace).
L'exemple qui nous a semblé le plus adéquat a été Cléopâtre VII : la dernière représentante de l'Égypte pharaonique et l'un des personnages féminins les plus cités, tant dans l’historique des femmes gouvernantes que dans l’imaginaire artistique et populaire. Avec ce choix, nous avons favorisé trois aspects importants pour notre comparaison artistique et sociologique :
• elle sert comme exemple d'une grande variété de discours historiques, du Ier siècle av. J.C. à nos jours;
· elle sert aussi comme exemple de discours représentatifs d’organisations et d'environnements sociaux très divers, contrastants dans leur situation temporelle, identité géographique et idiomatique, classe sociale et ambition expressive;
· il s'agit d'un personnage spécialement attractif pour deux attitudes opposées et très remarquables dans le cadre de cette investigation :
- ceux qui cherchent les exemples avec lesquels soutenir sa condamnation à la morale et les capacités de « la » femme;
- des artistes et des auteurs qui ont exercé un rôle important dans le traitement et la défense de la visibilité et les qualités de la population féminine.
Pour réaliser cette investigation nous proposons un modèle d'analyse intertextuelle du personnage dans les oeuvres artistiques, et l'appliquons à l'étude des différentes représentations de Cléopâtre. Nous projetons ce travail d'analyse dans deux phases :
1. l’analyse panoramique de ses évocations artistiques, pour détecter ses principales lignes de représentation et de possible identification archétypique (pendant ses presque vingt-deux siècles d'Histoire et en nous concentrant sur le cadre occidental);
2. la sélection de trois exemples spécifiques spécialement significatifs des tendances trouvées dans l'étude panoramique (finalement on a choisi les textes de Shakespeare-1606, Massenet-1914 et De Mille-1936), pour procéder à leur analyse individuelle.


1. Objectifs et hypothèses principales
1.1 Objectifs de la recherche.
Au-delà du premier but général qui est à l’origine de cette investigation (c’est-à-dire approfondir dans la perception de la femme-leader formée et soutenue à travers des représentations artistiques spécifiques), nous partons de quatre autres objectifs généraux:
1. approfondir dans l'analyse individuelle et comparative de la construction textuelle des personnages représentés, en faisant attention aux différents recours utilisés par différents langages artistiques;
2. identifier les traits des personnages qui ont une présence très forte dans l’imaginaire collectif de certains groupes sociaux, pour trouver les possibles processus de projection et consolidation de certains discours sociaux ;
3. dessiner, tester (et proposer pour des applications futures) un modèle d'analyse intertextuelle du personnage dans les représentations et les narrations artistiques;
4. approfondir dans l'analyse de la façon dans laquelle des contextes culturels différents ont formé, à travers certains motifs retraités par l'art et la fiction, leur vision des femmes qui exercent (ou aspirent à obtenir) un rôle remarquable de leadership social et de pouvoir politique.
De ces quatre points généraux, localisés dans l'origine de notre travail, dérivent d'autres séries de buts de caractères spécifiques. Entre ceux-ci nous pouvons souligner les suivants :
5. identifier et analyser des processus possibles d'apprentissage entre les différents arts, en ce qui concerne la question concrète de la création des personnages;
6. approfondir dans la comparaison analytique entre les traits que le personnage a dans le texte et ceux avec lesquels l'ont profilé d'autres artistes du même environnement de production, en faisant attention à l'affinité et les contrastes, ainsi qu’à l'insertion possible dans certains schémas archétypiques;
7. détecter les variations et les différentes caractérisations archétypiques que le personnage manifeste dans son évolution dans l'Histoire de l'Art, en faisant attention à la transformation de ses profils et à sa permanence ou réapparition dans différentes périodes historiques ;
8. approfondir dans l'analyse de la relation d’affinité ou de contraste entre les traits que le texte donne à son personnage et d'autres profils régnants dans l’imaginaire collectif de l'environnement social de production de l'œuvre.
1.2. Formulation des hypothèses
Après l'énumération des buts principaux qui ont défini et conditionné notre investigation, nous procédons à la formulation des hypothèses théoriques avec lesquelles nous initions cette recherche[2] :
1. La coordination entre ces deux disciplines est efficace et mutuellement enrichissante :
- les disciplines qui se concentrent dans l'analyse du texte artistique vu comme une création esthétique et un espace de l'expérience émotive du spectateur,
- et celles qui l'abordent comme un document avec lequel approfondir dans la connaissance des groupes sociaux et de leurs discours culturels et idéologiques.
2. Cette conjonction disciplinaire semble spécialement efficace et nécessaire dans le cas des recherches à propos de la situation sociale des secteurs de la population qui, dans certaines périodes, ont présenté la situation suivante: ils ont été presque invisibles aux yeux des chroniqueurs et des historiens mais, cependant, ils ont été amplement représentés par l'art.
3. Il est possible d'aborder une révision et une comparaison des principaux discours collectifs d'un contexte social concret autour d'une question spécifique (pour cette investigation, la perception collective de la femme-leader) à travers l'histoire des représentations d'un seul personnage, si celui-ci réunit certaines conditions préalables particulièrement représentatives de tel aspect social.
4. La définition et la considération de la « femme de pouvoir » réveillent une inquiétude spéciale dans un grand nombre de groupes sociaux. Dans une grande partie de l’ensemble de collectifs et de contextes expressifs, cette tension se manifeste, entre d'autres aspects, par le traitement unitaire des représentations artistiques de tel motif, en l'insérant dans des archétypes et schémas d’une certaine homogénéité.
5. L'évolution historique de la définition collective de la femme (et, concrètement, de la femme avec un fort pouvoir social) n’est pas seulement soutenue et renforcée dans les créations et réflexions élaborées par des femmes auteurs mais aussi (et nécessairement) grâce au travail de certains hommes (des artistes, penseurs, politiciens) qui ont collaboré (conscient ou inconsciemment) avec telle vision de la société.
Dans l’ensemble des hypothèses avec lesquelles nous initions notre recherche, il y a un groupe particulier formé par celles qui sont formulées spécifiquement par rapport avec le personnage que nous avons choisi comme objet d'analyse:
6. Cléopâtre VII, comme un motif d'inspiration pour des artistes et narrateurs, est un exemple d’extraordinaire pertinence pour analyser les différences avec lesquelles certains groupes sociaux ont construit sa définition collective de la « femme de pouvoir » au travers de l'art et de la fiction.
7. Nous prévoyons qu'une grande partie des représentations de ce personnage sera construite à partir des profils complexes et ambigus dont l'identification avec les structures d’un archétype principal sera possible seulement avec la détection et l'analyse de certaines nuances, subtiles mais très significatives.

2. Des antécédents théoriques et fondements méthodologiques
Depuis les dernières décennies du XXe siècle, l'analyse spécifique des « personnages féminins » a expérimenté une grande résonance dans les investigations artistiques et narratologiques, la sociologie, l'histoire, la psychologie ou la théorie de la communication. Dans cette période, les « Études de Genre » ont répandu et incorporé au discours régularisé de la science et les médias une grande partie de leurs perspectives, en faisant que le sujet de : « les femmes dans … » , soit maintenant important pour nombre d’enquêteurs et institutions des disciplines citées. Nous détachons deux aspects de ces investigations qui nous semblent spécialement importantes pour notre recherche :
1. ces recherches s’interrogent par les figures féminines du passé (historiques ou de fiction) qui se sont distinguées par des qualités qui permettraient de soutenir et mettre en exemple les revendications sociales des femmes de notre temps;
2. ces études coïncident dans la valeur des représentations culturelles de ces femmes faites par leurs contemporains: si l'étude des personnages féminins dans l'art a expérimenté une impulsion si forte dans les dernières décades, c’est en grande partie parce qu'il permet de mieux connaître la façon dans laquelle différentes sociétés ont exprimé, construit et renfoncé les définitions collectives de « la femme ».
Dans ce cadre scientifique, une grande partie des chercheurs exprime d’une façon partagée la nécessité d'entrelacer des disciplines différentes, un aspect qui nous semble particulièrement important et qui a guidé les fondements théoriques et méthodologiques de notre recherche :
- d’abord nous réalisons une analyse textuelle de certaines représentations artistiques, originaires de champs expressifs différents;
- puis, nous abordons une lecture sociologique de ses traits et énoncés, avec laquelle nous essayons de découvrir son rôle comme un élément constructeur de l’imaginaire collectif d'une époque et d’un environnement spécifiques[3].
2. 1. L’exposé des antécédents théoriques
Dans la version complète de cette thèse doctorale, nous présentons une explication détaillée des auteurs et des antécédents théoriques qui ont guidé notre tâche investigatrice en ce qui concerne l'analyse artistique et sociologique des textes. À ce moment, nous facilitons aussi les références et les réflexions concernant la perspective de genre, l'axe vertébral de notre recherche. Ensuite nous offrons un exposé succinct de telles parties, en faisant de brèves références à leurs noms et aux influences principales de réflexion et de la méthode auxquelles elles nous ont conduit.
A. Corpus théorique relatif à l'analyse artistique et textuelle du personnage. Pour cette partie de notre tâche, nous avons groupé nos auteurs de référence autour de quatre groupes principaux de perspectives analytiques :
• Les perspectives sémiótiques (Saussure, Lévi-Strauss, Eco), narratologiques (Propp, Greimas) et textuelles (González Requena), ont été notre point de départ pour structurer, d'une façon commune à toutes les oeuvres abordées, la tâche « d'épeler » ce que le texte écrit autour du personnage.
• En ce qui concerne notre analyse formelle et narrative des textes (ce que les textes contiennent et comment ils l'expriment), nous considérons que le langage cinématographique est, en grande partie, un grand héritage du reste des champs artistiques que nous voulions analyser. Nous jugeons donc opportun de guider notre travail à partir du propre travail de synthèse et de l'appropriation que certains des auteurs principaux de l'analyse de films (Adorno et Eisler, Aumont et Michel, Barthes, Burch, Bordwell, González Requena, Gubern) ont fait à partir des travaux de leurs prédécesseurs et collègues chercheurs des arts plastiques, littéraires, scéniques et musicaux.
• Cependant, il y a certains aspects abordés spécifiquement par des théoriciens originaires de ces autres champs artistiques qui nous semblaient indispensables. Comment ne pas recourir à Panofsky ou Argan, par exemple, à l'heure d'analyser les cléopâtres de Michel Angel ou d'Artemisia Gentileschi; comment ne pas nous laisser guider par Gurr ou Stoll dans l'étude de la tragédie de Shakespeare; comment ne pas suivre Huebner si nous voulons analyser l'opéra de Massenet. À ce propos, c'est peut-être, dans l'analyse de la construction musicale du personnage celui qui s'est trouvé le plus renforcé par cette révision spécifique : la façon par laquelle les auteurs spécialisés en langage musical abordent l’étude de personnages (comme Pedler, Mac Clarys ou Hadlock) nous a donné une ligne très importante d'approche aux textes lyriques et de l'opéra qui font partie de notre corpus d'étude.
• Une fois appréhendé l'apport de ces théoriciens, il y a un autre groupe que nous détachons comme référence essentielle pour la tâche de comparaison des textes du corpus artistique de cette investigation. Puisque notre analyse textuelle poursuit une deuxième phase comparative, nous avons accordé une attention spéciale à la façon par laquelle certains de ces auteurs ont suivi « la trace » de quelques personnages qui ont été représentés dans l'Histoire de l'Art avec une insistance particulièrement forte. Nous détachons dans ce point certaines oeuvres qui nous ont semblé spécialement inspiratrices comme Le rimpatriata degli archetipi, où Umberto Eco analyse les personnages comme des « archétypes intertextuels »[4] ou l'investigation comparative Masques de fiction de Romain Gubern[5].
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B. Corpus théorique relatif à l'analyse sociologique du texte artistique et de ses personnages. Notre rapprochement sociologique aux personnages artistiques part des théories élaborées depuis des lignes de recherche si différentes comme celles-là de Krakauer, Sorlin, Hayward, Goldman, Geertz, Said et Péquignot (et celles-là de Panofsky, MacClary ou Pedler, déjà mentionnées), dans lesquelles nous trouvons une perspective commune :
• les significations qu'une société transmet dans ses textes artistiques appartiennent à un paradigme partagé par l'auteur et ses lecteurs;
• ce paradigme est construit par des structures qui appartiennent à ce cadre social-là et fait allusion aux énoncés qui intéressent et affectent ses intégrants;
•par conséquent, l'étude de la production artistique permet de mieux comprendre la conception qu'une société a de ses thèmes transcendants.
Cette ligne de recherche réunit des trajectoires différentes comme celles de Durkheim, Max Weber et Passeron (et ses continuateurs comme Bellah, Shils ou Eisenstadt), avec « les études sémiotiques de Roland Barthes, Umberto Eco et Marshall Sahlins, le post-structuralisme de Foucault; l'anthropologie symbolique de Geertz, Victor Turner et Mary Douglas (…) les théories narratives de Northrop Frye et ses continuateurs littéraires »[6]. Passeron expliquait de cette façon le « contrat » signé par la Sociologie de l'Art : « que cette connaissance sociologique soit spécifique des oeuvres comme des oeuvres d'art et de ses effets comme des effets esthétiques; c'est-à-dire qu'elle arrive à identifier et à expliquer les processus sociaux et les traits culturels qui donnent la valeur esthétique de ces œuvres »[7]. Il s'agit de prendre l'art comme objet d'analyse pour, dans les mots d’Alexandre, « étudier la façon dans laquelle les personnes font significatives ses vies et ses sociétés, les façons dont les acteurs sociaux imprègnent d'un sentiment et une signification ses mondes. (…) Notre but est reconstruire la conscience collective depuis ses fragments documentaires et depuis les structures constructives qu'elle implique ».[8]
C. Corpus théorique de l'analyse des personnages féminins relatifs au sujet du pouvoir social et politique. L'étude de Cléopâtre comme motif artistique. L'étude scientifique des relations de « Genre et Pouvoir » a expérimenté un grand développement dans les cinq dernières décades[9]. Autour de la décennie de 1960 ce sujet commence à impliquer, dans une tendance de plus en plus partagée et croissante, aux équipes scientifiques de la Psychologie Sociale, la Sociologie ou l'Anthropologie[10]. Par rapport à cette ligne, cette investigation a suivi les travaux de deux groupes principaux de scientifiques :
• les auteurs de la réélaboration de « l’Histoire des Femmes » (Anderson et Zinsser, Duby et Perrot, Bock, Morant), parmi lesquels croît la tendance à s’interroger sur le rôle et la reconnaissance que la population féminine de différents cadres sociaux et historiques avait dans les institutions de gouvernement: des auteurs tels que Goody, Yan Thomas, Zaidman, Zemon Davies, Valode, Fraser, Sineau, Maurice Sartre, Späth, Fernand Álvarez ou Gago font des recherches sur la considération légale, les droits et la participation des femmes dans l'organisation de leurs sociétés;
• ceux qui fondent leur recherche dans l'analyse des représentations artistiques de ces femmes faites par leurs contemporains respectifs, en s’interrogeant par la relation entre telles images et la situation réelle des retraitées :
-Hussain, Loraux, Campbell, Diner, Williams ou Olmos étudient la relation entre les images religieuses ou mythologiques féminines et la situation sociale quotidienne des femmes des sociétés qu'ont inauguré et accueilli telles figures et discours;
-Plácido, Leduc, Figes et Lissarrague analysent la manière dans laquelle les représentations de l'Antiquité réfléchissent la considération sociale des femmes;
-Frugoni et Duby étudient, respectivement, les évocations plastiques et littéraires de la femme médiévale;
-depuis le vocabulaire de l'iconographie, Borin interroge les « images de femmes » sur la situation de la population féminine de la Renaissance européenne;
-Desaive fait des recherches sur le traitement de la femme « prétexte », « édifiée » ou « rêvée » dans les textes poétiques, moralistes et théâtraux des XVIe et XVIIe siècles;
-Daniel E. Freeman fait des recherches sur le traitement de « la reine guerrière » dans l'opéra baroque;
-Nicholson analyse les figurations paradoxales de la femme du drame européen des XVIe et XVIIe siècles, une scène exceptionnelle du débat autour de la définition des défis et les conduites féminines;
-Vias Mahou analyse des personnages littéraires clefs comme emblème de certains archétypes féminins de transgression contre des barrières sociales importantes de leur contexte historique ;
-Michaud et Higonnet réfléchissent autour du phénomène du XIX siècle artistique de la fascination par une femme presque inconnue ; ou sur la nouvelle conscience du XXe siècle à propos du pouvoir des représentations et sur les échanges exécutés par les femmes artistes qui interviennent à la construction d'un nouveau imaginaire collectif.
Dans ce deuxième courant, la figure de Cléopâtre VII se détache comme un sujet d'étude et d'analyse très pertinent :
• Dans les dernières années, plusieurs institutions et musées d'Histoire et de l'Art ont coïncidé dans la convenance et l'attrait de ce sujet, en organisant des exhibitions de révision du personnage:
-en 2001, le British Museum de Londres et le Field Museum de Chicago ont exhibé l'exposition Cleopatra of Egypt : From History to Myth et le Palazzo Ruspoli de Rome a présenté la version Cleopatra, Regina d’Egipto;
-en 2004, le Musée d'Art et d'Histoire de Genève a organisé la brillante révision Cléopâtre dans le miroir de l'art occidental, avec des oeuvres originales de musées et de collections particulières de tout le monde;
-en 2005, le Palazzo della Penna de Perugia a accueilli l'exhibition Michelangelo – La due Cleopatre;
-entre octobre 2006 et février 2007, le Bucerius Kunst Forum de Hambourg a présenté, autour de la Vénus d'Esquilino, l'exhibition Kleopatra und die Caesaren projetée comme un rapprochement au personnage historique et un panoramique de son évocation artistique durant les XVIe et XVIIe siècles.
Les travaux d'investigation et d'analyse artistique qui ont été élaborés autour de l'organisation et la présentation de cette sorte de projets se sont concrétisés dans des publications rigoureuses, comme celles qui sont coordonnées par Susan Walker et Peter Higgs pour le Musée Britannique de Londres ou Claude Ritchard et Alison Morehead pour le Musée d'Art et l'Histoire de Genève. Nous les considérons comme des oeuvres de référence qui, surtout dans le cas de Ritchard et de Morehead, réunissent des auteurs importants, avec des perspectives de l'analyse artistique et littéraire très différentes:
-Jean-Luc Chappaz ou Matteo Campagnolo abordent des analyses archéologiques des pièces élaborées pendant le règne de Cléopâtre;
-Philippe Boyer, Jean Louis Schefer, Céline Richard-Jammet ou Marie-Stéphanie Delamaire se spécialisent dans des représentations picturales ou sculpturales des différentes étapes esthétiques de l'art occidental;
-Yves Bonnefoy, Tristan Macé et Alain Perroux analysent des portraits théâtraux et de l'opéra.
• Finalement, on doit souligner un groupe d'auteurs qui ont travaillé la révision artistique de ce personnage spécifiquement comme un exemple pour l'analyse des imaginaires collectifs de certains groupes sociaux:
-Lucy Hughes-Hallet approfondit dans les distorsions et les fantaisies de l'imaginaire occidental projetées sur la reine égyptienne;
-Mary Hamer élabore une analyse comparative des signes occidentaux de construction du mythe;
-Mary Nyquist analyse l'évocation artistique par rapport au « barbarisme » et au « règlement féminin » du premier républicanisme anglais;
-Brigit Tailor étudie la composition de Chaucer comme exemple d'analyse de la situation de la femme médiévale;
-Francesca Royster élabore une analyse exhaustive de l'appropriation que la communauté afro-américaine fait du motif de Cléopâtre et ses évocations artistiques comme emblème social d'une origine glorieuse de la communauté noire américaine;
-Diana Wenzel analyse les représentations littéraires et cinématographiques comme un exemple de la construction du stéréotype oriental dans l'imaginaire occidental du commencement du XXe siècle.
2.2. L’exposé des fondements méthodologiques et proposition d'un modèle d'analyse du personnage dans l'oeuvre d'art dans une perspective textuelle et sociologique.
Cette investigation propose un modèle d’analyse avec lequel identifier, interpréter et comparer les différents niveaux qui collaborent dans la création du personnage dans des textes artistiques de différents langages expressifs. Cet examen poursuit deux conditions fondamentales :
1. approfondir dans les structures techniques, narratives et sémantiques du texte,
2. rattacher le profil du personnage à d'autres expressions de l’imaginaire collectif du cadre historique, social et culturel dans lequel il a été créé (et pour lequel il était destiné, dans une première instance).
Ce processus s'accommode de deux phases :
1. D’abord nous analysons le personnage à partir d'une étude interne de l'oeuvre d’art et en analysant l'effet qu'il produit dans le récepteur. En partant de l'analyse textuelle, nous utilisons certains apports des théories structurales, iconiques-formelles et psychanalytiques. Dans cette phase, nous analysons chacun des éléments de l’énoncé et de l’énonciation qui participent à la construction du personnage.
2. Avec les résultats de cette première phase nous pouvons déjà faire la comparaison entre le texte et d’autres discours extérieurs à celui-ci, avec lesquels l’interroger sur son cadre social de création : d'autres exemples artistiques avec lesquels notre personnage peut partager certains traits de sa forme ou son contenu significatifs pour notre recherche spécifique (la représentation de la femme-leader) et des documents historiques originaires d'autres sphères sociales, comme des témoignages et des discours politiques, des normes légales, des articles journalistiques, des messages publicitaires, des manuels de conduite ou des textes pédagogiques. Dans cette analyse, le texte est considéré comme un produit culturel mais aussi comme un agent socialisateur.
Dans la version originale et complète de cette investigation doctorale, nous présentons un chapitre détaillé dédié à l'exposé de notre modèle d'analyse, ainsi qu’à certains aspects préalables (comme la description de nos outils descriptifs, de citation et documentaires) qui conditionnaient aussi d'avance notre travail. Pour présenter brièvement les niveaux principaux de notre double modèle d'analyse nous pouvons indiquer les points suivants :
I. Analyse textuelle du personnage
Notre modèle d'analyse textuelle du personnage suit les pas suivants :
• l’élaboration d’une brève phase d’introduction de chaque texte, en fonction de deux aspects généraux basiques :
-la situation du texte dans l'Histoire de l'Art[11], en faisant attention :
-à la provenance esthétique du texte
-aux trajectoires des créateurs principaux, avec une première révision générale de l'étape de leurs carrières artistiques dans laquelle a lieu la production du texte choisi;
-l’existence d’une autre oeuvre artistique originale qui servait comme source d’inspiration du texte choisi, ainsi que des sources historiques concrètes revendiquées comme guide principal pour la composition de l'oeuvre.
•l’analyse des trois niveaux fondamentaux qui structurent la segmentation de notre examen du personnage:
-les attributs,
-les motivations,
-l’intervention dans l'action.
Ensuite, nous énumérons les critères essentiels qui ont guidé le déroulement de chacun de ces trois parties analytiques, un chapitre que le lecteur trouvera exposé d'une façon détaillée dans la version complète de cette investigation.
1. La définition du personnage à travers ses attributs
Dans son investigation sur les contes merveilleux russes, Propp inclut dans cette catégorie des aspects de définition du personnage tels que[12]:
· le nom du personnage,
· son apparence (l’âge, le genre, la situation vitale, et les principales particularités de l'apparence),
· des caractéristiques de l'entrée dans la scène,
· des propriétés de l'habitat.
En plus, notre définition de l'attribut inclut aussi les qualités émotives et intellectuelles qui configurent la personnalité.
Nous procédons à l'analyse de ces cinq aspects à travers le schéma que nous présentons dans les lignes suivantes, avec lequel nous organisons l’examen de ces points par rapport aux divers canaux d'énonciation du texte.
1.1. La définition des attributs à partir des éléments du texte appartenant au discours non-verbal
Dans cette partie, nous analysons les attributs du personnage qui sont « montrés » par le texte sans recourir aux mots des sujets de la trame ou d‘un narrateur explicite. C'est une séparation qui peut être plus efficace dans les arts scéniques avec du texte verbal (comme le théâtre, le cinéma ou l'opéra), mais elle sera aussi contemplée dans les arts littéraires sans l'image (où les descriptions de l’expression du visage du personnage, sa caractérisation physique ou sa localisation géographique, par exemple, font une partie aussi très importante de sa définition).
Nous divisons en deux niveaux l'analyse de ces attributs du personnage construit à partir de l'allusion des aspects non-verbaux [13]. :
1.1.1. Les attributs que le personnage montre par lui- même
1.1.1.1. La caractérisation externe
1.1.1.2. Les expressions du vissage et du corps
1.1.2. Des attributs du personnage construits à partir des éléments externes à lui- même
1.1.2.1. L’analyse de l’entrée et la sortie de scène
· L’analyse des éléments choisis par le texte pour inaugurer son énoncé et l’évaluation de la présence ou absence de référence au personnage dans ce point de la narration: dans ce niveau, on analyse le point de vue de la narration, la sélection de l'espace et des objets symboliques et les messages (verbaux ou musicaux) qu’il y a dans les introductions narratives, les ouvertures de l'opéra, les préludes théâtraux ou les crédits initiaux cinématographiques.
· La localisation de la présentation et la dernière apparition du personnage dans l'action narrative.
· L’identification et la comparaison des caractéristiques de l'environnement dans lequel ces deux situations se succèdent, et interprétation des charges sémantiques de sa similitude ou contraste.
· L’identification des accompagnateurs du personnage dans les deux situations, ainsi que des agents qui présentent le personnage dans le texte ou succèdent à sa sortie de la narration.
· Description et comparaison des attributs du personnage montrés durant son entrée et sortie de scène.
1.1.2.2. L'espace comme élément de construction du personnage :
· Lecture explicite de la définition du personnage au travers de l’information concernant son origine géographique, sa situation économique et sociale ou, même, la manière esthétique avec lesquelles le texte l'identifie.
· Détection de certaines caractéristiques de l'environnement qui peuvent aussi se rassembler à certains attributs physiques, émotifs ou psychologiques du personnage.
· Lecture connotative des associations qui peuvent s'établir (conformément à l’imaginaire collectif du groupe social dans lequel le texte s'est produit) entre certains traits du personnage et les stéréotypes autour de l'origine géographique et sociale avec lequel le texte le définit.
1.1.2.3. La définition du personnage à partir du langage des objets :
• Les aspects de l'iconographie, du symbolisme et de l’usage quotidien que codifient la lecture des objets qui apparaissent dans les caractérisations du personnage.
· L’analyse du processus de signification des objets choisis par le texte comme des porteurs d'information symbolique du personnage, en faisant attention aux aspects comme les suivantes :
-sa fonction pratique (ce pour quoi il est utilisé, outre tout processus symbolique),
-la forme et les caractéristiques de consistance et de tissure (des éléments de connotation qui peuvent êtres utilisés par le texte pour insister et souligner certains énoncés).

1.1.2.4. Des événements externes ou les actions visibles qui réfléchissent l'état mental ou la situation vitale du personnage.
1.1.2.5 Définition du personnage à partir des composants formels plastiques du texte.
Cette partie de l'analyse s'occupe de l'apport que les paramètres formels plastiques des langages avec une forte présence du visuel font à la définition du personnage. Nous détectons ici comment ont été utilisés ces composants du langage pictural, sculptural, théâtral ou cinématographique pour définir le sujet de l'action narrative. Ainsi, dans ce niveau nous analysons les aspects suivants :
· la tissure et la surface matérique comme des éléments de connotation;
· les effets d'illumination et de la photographie qui définissent le personnage par rapport à certaines qualités de son apparence qui peuvent connoter des traits psychologiques ou animiques;
· la signification de la perspective visuelle dans laquelle on place le spectateur pour la description de certaines actions et réactions du personnage;
· les possibles connotations du format ou la grandeur du plan;
· la composition interne du cadre comme recours de signification de la scène;
· l'intervention du montage dans l'établissement de certaines relations entre des séquences consécutives avec un fort contenu symbolique.
1.1.2.6. La description du personnage au travers du discours musical :
· l’identification et la description des schémas basiques des thèmes musicaux associés au personnage en faisant attention aux aspects suivants :
-le dessin mélodique et les effets d'attaque et phrasé,
-la structure harmonique,
-la structure formelle,
-le tempo,
-la gamme de recours sur l’intensité du son et les modifications du tempo;
· l’analyse des sous-textes transmis par la musique : nous devons identifier si l’énoncé écrit par les éléments constructifs cités du personnage -la mélodie, l’harmonie, la structure formelle, le tempo, etc. - coïncide avec les discours transmis à partir d'autres canaux d'énonciation (comme le mot ou l'image) ou, si au contraire, il essaie de les contredire;
· l'analyse de la possible concordance avec des patrons musicaux folkloriques ou historiques, des emblèmes musicaux de certains groupes sociaux ou avec certaines constructions corporelles associées à la danse ;
· l'interprétation de l'identification que le texte peut établir entre le personnage et certains instruments musicaux;
· en cas de représentations créées à partir du chant humain, on analyse des qualités vocales spécifiques choisies par le compositeur pour le personnage en considérant les possibilités, les conventions et les modes du contexte spécifique de création du texte :
-la tessiture,
-la couleur de la voix,
-les exigences et possibilités techniques d'agilité ou d’intensité;
· la détection des identifications entre des motifs musicaux et certains thèmes abstraits qui peuvent définir des états principaux du personnage.
1.2. La description des attributs du personnage à partir du discours verbal.
Les éléments avec lesquels le texte peut définir le personnage dans le discours verbal opèrent aussi avec les niveaux de la dénotation et de la connotation. Pour ce point de l'analyse nous avons choisi de segmenter notre examen à partir des trois agents de la narration qui, avec ses mots, interviennent à la caractérisation du personnage étudié :
1.2.1. Description du personnage à partir du discours verbal du narrateur.
1.2.2. Description du personnage à partir du discours verbal d'autres sujets de l'action.
1.2.3. Description du personnage à partir de son propre discours verbal.
Dans l'étude des expressions verbales de ces trois agents nous faisons attention :
· aux références qui définissent directement le personnage, pour détecter les coïncidences ou les contradictions entre les évaluations faites par les différents sujets de la narration ;
· aux mots les plus significatifs qui, déjà dans le niveau de la connotation, disposent le réseau de significations dans lequel apparaît le personnage;
· qu’il ne faut pas seulement considérer « le contenu » des mots des personnages, mais aussi les traits d'expression et de la rhétorique avec lesquels l'auteur a caractérisé sa « forme » (les marques avec lesquelles le discours verbal prétend caractériser le personnage géographique ou historiquement) :
-l’emploi de certaines formules rhétoriques;
-l'usage d'un vocabulaire différencié à celui du reste des personnages;
-des possibles marques d'accents qui essaient de remettre le personnage à une certaine origine géographique ou dans une époque ou un archétype spécifiques.
2. Les motivations comme élément de définition du personnage.
Quelle que soit la grandeur ou le sérieux dramatiques d'un texte et le caractère des actions que réalisent ses personnages, l'analyse du moteur qui provoque et explique telles conduites constitue une source de grande richesse pour notre étude des textes et de la relation de ceux-ci avec leurs sociétés de production[14]. Pourquoi les personnages prennent-ils le chemin que l'auteur a tracé pour ceux-ci ? Voilà un point essentiel, dans le texte, qui lie les attributs qui caractérisent le personnage et les actions que celui-ci exécute.
Après Propp[15]., beaucoup des théoriciens ont controversé ce composant avec lequel analyser la façon dans laquelle le texte définit les personnages, en accordant une grande importance aux variantes qu'il présenterait le long de différentes périodes de la Narrative[16].. Cependant, nous considérons cet aspect comme un facteur essentiel et pratiquement constant et, donc, applicable à l'ensemble complet de notre corpus artistique : les causes fondamentales qui, selon le récit, mettent au sujet de l'action à exécuter des actes déterminés, constituent un trait fondamental de sa représentation et même de la propre évaluation avec laquelle le texte peut présenter le personnage.
Si nous analysons un personnage inséré dans un rôle spécifique - comme celui, par exemple, de l'exercice du pouvoir politique - il nous semble indispensable de détecter quelles motivations profondes sont attribuées par le texte à ses actions : l'ambition, la protection dévouée des leurs, l'amour en couple, la rivalité, la vengeance, même la lassitude, sont des causes différentes avec lesquelles le récit peut justifier (et, même, juger d'un point de vue moral ou éthique) les actions d'un personnage. Pour cela (encore une fois), nous devons rattacher nos conclusions avec ce que les divers courants historiques, philosophiques et esthétiques admettent autour d'un concept si controversé comme « la motivation » : pour analyser la définition, les causes et la puissance que l'auteur d'une oeuvre donne aux moteurs qui guident les actions de ses personnages, nous devons confronter ces éléments-ci avec la tradition de pensée (et, dans celle-ci, les traditions littéraires et de représentation) dans laquelle tel auteur et ses personnages s'inscrivent. Quelle que soit son « explication » dans le texte, l'analyse du moteur des actions des personnages apporte une information précieuse avec laquelle rattacher les personnages aux normes et désirs de ses publics contemporains.
Dans cette catégorie d’analyse, un niveau spécifique où le texte peut imprimer une certaine évaluation du personnage est la nature et la grandeur de ses manques (un espace où le texte peut « justifier » ou «ne pas justifier» les motivations et actions du personnage) : au-delà des dernières raisons qui guident le personnage dans ses actions, le texte exprime aussi les causes initiales qui le conduisent à telles motivations, en offrant ainsi une représentation plus complète et profonde du sujet de l'action narrative et en énonçant une certaine « compréhension » ou « condamnation » vers ses actes. Même Propp fait attention à cet aspect en étudiant comment le personnage devient conscient de ses manques, élément qui peut être très éclairant à l'heure d'analyser le point de départ de notre objet d'étude. Dans son investigation il trouve deux grands types de prise de conscience de ce manque : l'apparition momentanée de l'objet absent, qui sert de moteur pour que l'action se développe; ou l'action d'un autre personnage qui avise le sujet principal de ce qui lui manque.
3. La définition du personnage à partir de son intervention dans l'action.
Notre recherche s'oriente, dans cette partie, en fonction de trois aspects fondamentaux :
3.1. Le rôle actanciel et la fonction narrative du personnage.
En prenant les contributions des théoriciens comme Propp, Greimas, Rastier, Coquet, Chabrol, Courtés ou Landowski comme point de départ, nous trouvons que les acteurs de la narration peuvent dégager un ou plusieurs rôles comme les suivants :
· le héros est le sujet principal de la trame, chargé d'accomplir un schéma d'action orienté à l'obtention d'un but ou le rétablissement d'une perte initiale;
· le destinateur de la tâche (vrai « support narratif de la dimension éthique et symbolique du récit »[17].);
· l'antagoniste poursuit le même but que le héros, tellement que seulement l'un des deux peut réussir à satisfaire la réussite;
· l'agresseur est ce sujet qui provoque un état de déséquilibre pour le héros, en le privant de sa situation de « bonheur » original;
· le donateur donne au héros sa capacité finale d'accomplir son entreprise;
· l'auxiliaire collabore dans les tâches et les déplacements que le héros doit réaliser pour obtenir son but;
· le personnage cherché s'identifie à la réussite finale du héros (par exemple, cette « princesse » que Propp marque comme un rôle actanciel spécifique des contes merveilleux).
3.2. La définition du personnage à partir de son schéma actanciel dans le récit.
Nous prenons de Greimas le concept de « schéma actanciel » (qui se complète dans sa théorie avec le « niveau paradigmatique ») pour faire référence au programme des actions et réactions que le personnage développe pour obtenir son but dans le récit. Dans cette phase, nous concentrons notre analyse dans deux tâches principales :
· connaître le schéma basique des actions du personnage, de son point du départ au dénouement narratif,
· interpréter la signification que ces actions enferment.
Dans ce sens, nous nous approchons de la position de Gubern, qui choisit de régulariser le schéma actanciel et le niveau paradigmatique que Greimas compose à partir de Propp, avec une formulation d'application certainement plus universelle : « quelqu'un désire obtenir quelque chose et trébuche sur les difficultés pour l'obtenir »[18], à ce que nous pouvons ajouter la recherche de quel type d'actions il entreprend pour obtenir son but et pour surmonter l'adversité.
3.3. La définition du personnage à partir de sa relation avec d’autres sujets de l'action représentée.
Nous considérons opportun de réserver une partie spécifique pour analyser les relations que le personnage soutient avec d’autres acteurs, ainsi que la propre identité thématique de ces autres sujets qui conditionnent son évolution dans le récit. Avec cette tâche, nous pouvons interpréter les connotations avec lesquelles le texte peut définir le personnage en fonction de comment sont-ils, ceux qui l'aident à obtenir ses buts et ces autres qui s'interposent entre lui et sa réussite.
II. Modèle d'analyse contextuelle du personnage
Après l'analyse « interne » des œuvres, nous pouvons déjà aborder une analyse « externe» qui confronte les résultats obtenus avec d’autres représentations et composantes de l’imaginaire collectif d'un environnement social spécifique[19]. : avec ces résultats nous arrivons à cette deuxième partie de notre analyse, dans laquelle nous rattachons ces traits essentiels du personnage avec le cadre historique, sociologique et culturel dans celui qui a été créé. L’objectif de cette analyse est, comme nous l’avons exposé dans la présentation de cette investigation, de déchiffrer ou interpréter certains énoncés qu'un contexte spécifique peut révéler de soi-même à travers des personnages des récits qu'il construit. Et, dans cette perspective, l’objectif concret qui guidera notre analyse dans cette partie sera de trouver les traits qui reflètent la considération collective que ces groupes ont de la femme avec le pouvoir politique et social.
Pour aborder le texte avec cette perspective, comme un témoignage (conscient ou inconscient) de la mentalité d'un certain contexte historique et social[20], nous proposons de connecter deux aspects essentiels :
· à partir des caractéristiques détectées dans la phase précédente, nous comparerons le personnage avec son référant fondamental : nous contrasterons les élections et les relations que la représentation a élaboré à partir de l'anecdote préalable (c'est-à-dire le référant historique ou littéraire ou un certain archétype) qui a servi comme un prétexte ou une matière première à la création du personnage concret;
· quand ces qualités et relations sélectionnées par le texte auront été identifiées, nous procéderons à leur interprétation dans une optique contextuelle : en situant le récit dans le cadre social dans lequel il a été créé, à partir des caractéristiques fondamentales de ses auteurs et du premier public.
1. Comparaison entre le personnage et son référant spécifique.
Nous trouvons particulièrement significatif d’observer la manière dans laquelle une époque hérite un motif historique ou littéraire et puis le représente en lui donnant ses mots et son regard contemporains. La possibilité de connaître le référant spécifique considéré par un auteur pour faire son portrait artistique du personnage, nous permet de vérifier quels éléments de cette représentation originale ont été sélectionnés, éliminés ou nuancés pour s'approcher du discours « cohérent » et aux attentes de son environnement de réception. Cette relation transversale parmi des textes et des contextes peut être appréciée si nous suivons le cours d'un personnage mythologique ou littéraire (Ulysse, Carmen, Lulú, Faust, Don Juan) ou, comme cette investigation choisit, celui d'un personnage historique dont la biographie semble spécialement attractive pour l'art et la fiction d'époques postérieures (Jules César, Cléopâtre, Jeanne d'Arc, Napoléon, Isabelle I de l'Angleterre). Dans ce dernier cas, après avoir compté sur le référant élaboré par les historiens (un peu moins ornementé que l'artistique, bien qu'aussi conditionné par la disponibilité de documents ou témoignages et par la subjectivité de l’historien), il semble spécialement clair que les anecdotes ont été sélectionnées dans la représentation artistique et de quelle manière elles ont été mises en rapport (utilisées ainsi comme prétexte pour énoncer un certain discours). Nous considérons ainsi que l'énoncé fondamental de ces récits artistiques sur l'Histoire est, avant tout, une interprétation de l’Histoire elle-même[21]. .
Le récit artistique se trouve ici avec une responsabilité subtile, dans laquelle il a à combiner deux nécessités :
· la satisfaction des attentes des lecteurs
· et la relative fidélité historique que l’auteur s'auto impose.
Les défis que le texte doit surmonter pour élaborer une narration ou une représentation d'inspiration historique font de ce type d'oeuvres une source spécialement riche pour l'analyse sociologique. Toujours en comparant les choix de l'auteur avec les sources historiques dont il disposait, nous analysons les solutions spécifiques que l'artiste trouve par rapport à deux éléments de l’adaptation historique :
· renforcer certains doutes d’historiens (par rapport, par exemple, certains traits ou caractéristiques émotionnelles des personnages historiques)
· et s'occuper des attentes du public (qui a toujours une image préalable de certains personnages, époques ou épisodes historiques).
Avec cette analyse, nous obtenons une information très importante à propos de ce que, dans cette situation particulière de la création et la réception d'une oeuvre artistique, ces personnes (les auteurs et leurs publics) acceptaient comme vraisemblable et émouvant. Au travers de la comparaison entre ce qui est « réellement » arrivé historiquement et ce que le texte choisit de représenter comme tel, nous pouvons obtenir un portrait éclairant de ce qui est le « croyable », « émotif », « agréable » ou « intéressant » pour l'environnement social où l'oeuvre se produit.
2. La comparaison entre les traits du personnage et certains éléments de l’imaginaire collectif et du discours partagé dans son environnement social de création.
Dans cette phase de l'analyse, nous interprétons les traits du texte qui manifestent une relation spéciale avec l’environnement dans lequel celui-ci a été créé, pour détecter les énoncés qui peuvent réfléchir la vision que le contexte social avait à propos des sujets et des motifs traités par l'oeuvre. Nous nous occupons ici de déchiffrer la lecture de « l’oeil de l'époque » détachée des formes et contenus du texte : c'est-à-dire le bagage (l'imaginaire, la mentalité) que les lecteurs des différentes étapes sociales et historiques ont pour accéder aux messages des oeuvres artistiques de son moment[22].
Il s'agit maintenant de se rapprocher de cette perspective archéologique que Panofsky revendique pour le travail de l'historien et l'annaliste de l'art : l'expérience esthétique autour de l'oeuvre doit s'accompagner d'une contextualisation de celle-ci, élaborée à partir des documents originaires du cadre spécifique dans lequel elle a été créée. Avec ces documents (d'un caractère qui n’est pas seulement artistique mais aussi politique, religieux, social ou économique), nous pouvons approfondir un peu plus les aspects qui révèlent certaines clés formelles, icóniques et idéologiques qui travaillent dans le texte[23].
Normalement, l’efficacité de la contextualisation est directement attachée à sa précision dans l'axe de coordonnées temporelles et spaciales : en fonction du lieu et l'époque spécifiques où elles ont lieu, les expressions artistiques sont produites dans différents paradigmes de conventions formelles, rôles sociaux des artistes et des circonstances sociales et culturelles[24]. Mais il est certain que la délimitation de ce contexte social « spécifique » est un sujet qui demande un traitement particulier quand il s'applique à l'étude de l'évolution de la participation des femmes dans le pouvoir social. Nous voulons comparer quels traits du personnage que nous analysons peuvent aussi être présents dans d'autres documents de « son époque » (des documents éducatifs, des manuels de conduite, des lois et les postulats des institutions qui dirigent cette société, des discours répandus par la presse …) pour connaître mieux le regard collectif et partagé autour des femmes avec une forte ambition de pouvoir social et politique. Mais, en ce qui concerne ce sujet, « l'époque » et « le lieu » sont des éléments de localisation pas toujours similaires aux critères généraux de la périodisation et de la délimitation géographique utilisés par les historiens dans leurs travaux de classification des étapes de la pensée ou l'organisation économique, politique et religieuse des civilisations : plusieurs des grands échanges et des révolutions qui nous amènent à classifier l'Histoire de l'Humanité conformément à une série d'étapes et de zones géographiques, n'ont pas affecté de la même façon certains groupes sociaux, entre lesquels nous devons inclure la population féminine. Les caractéristiques de la considération sociale, légale et politique « des femmes » (ainsi définies, dans un collectif unique, par des normes civiles et religieuses de plusieurs étapes et groupes historiques) se sont trouvées à peine altérées quand d'autres secteurs de civilisations expérimentaient cependant des métamorphoses importantes qui ont changé le cours de l'Histoire[25].
Tout au long de cette analyse comparative dans laquelle nous confrontons les textes artistiques avec les mots et les formes d'autres types de documents qui peuvent présenter de fortes affinités, nous allons vérifier qu’en ce qui concerne la considération sociale des femmes qui exercent des postes de leadership social ou politique, il y a des similitudes notoires entre des siècles et des lieux géographiques que, cependant, nous séparons à l'heure d'étudier et diviser l'Histoire générale des civilisations. Une fois assumée cette caractéristique spécifique de notre objet d'analyse, nous le comparerons avec d'autres textes de « son environnement » : des oeuvres originaires, peut-être, d’un siècle différent et d’un autre pays, mais qui sont porteurs, quand même, d’un discours identique à propos du « lieu adéquat » des femmes dans la société, de l'éducation « convenable » des petites filles ou des critères de censure de certaines femmes « différentes à la tradition ». À partir de cette interprétation du discours textuel par rapport à son environnement de production, nous pourrons obtenir un plus grand degré d'approfondissement dans ses significations.

2.3. L’étude panoramique du personnage, l’analyse approfondie et une nouvelle comparaison.
L'application de ce modèle peut se poser dans une ample gradation d'exhaustivité. Dans l'investigation qu'ici nous résumons, nous considérons que notre travail d'analyse et de comparaison doit être abordé dans une optique double, simultanée et d’enrichissement réciproque :
· nous avons besoin de l'analyse générale des représentations qui conforment notre corpus (les évocations artistiques de Cléopâtre VII dès le Ier siècle av. J.-C. jusqu'à nos jours) pour détecter quelles grandes tendances pouvaient les grouper et distinguer,
· et aussi nous avons besoin de l'analyse d'application intensive (de rapprochement microscopique, nous pourrions dire) où quelques textes choisis sont étudiés dans tous les niveaux d'énonciation que nous avons isolés chez notre modèle.
Nous estimons que chaque perspective a besoin de l'autre, et abordons ainsi l'analyse du personnage dans une double proximité avec laquelle connaître deux questions principales :
· son évolution et les différentes périodes par rapport à sa résonance et pertinence comme un porteur de certains discours,
· la manière précise dans laquelle certains auteurs (des références clefs des dites manifestations, imitées sans doute par d'autres artistes) ont profilé les traits et énoncés du personnage.

3. Une étude panoramique. La représentation de Cléopâtre VII dans l'art occidental du Ier siècle av. J.-C. à 2007.
Le travail analytique de cette investigation a besoin de partir et de s'accompagner d'une comparaison générale des représentations artistiques de Cléopâtre VII[26].. Le processus suivi dans cette partie de notre investigation peut se résumer dans deux phases :
1. La recherche et la compilation du corpus artistique (nous avons primé les productions plastiques, littéraires, scéniques et musicales de la scène occidentale[27]).
2. L’analyse comparative du corpus, pour détecter quelles grandes tendances peuvent grouper et distinguer les oeuvres réunies. À son tour, cette tâche fait attention à trois aspects principaux :
- les particularités historiques et sociales des différents environnements de production,
- les niveaux de l'examen qui structurent notre modèle d'analyse (l’expression verbale, la caractérisation externe, et cætera),
- les possibles identifications avec certains archétypes.
Le compendium réuni contribue à l'analyse comparative artistique et sociologique avec deux caractéristiques importantes :
· Chaque cadre de création artistique qui choisit Cléopâtre comme motif d'inspiration l'adapte à ses discours et conventions esthétiques contemporaines d'une façon très explicite et marquée : le personnage adopte les attitudes, les mots et les vêtements de chaque contexte d'une façon beaucoup plus flexible encore que d’autres femmes de l'Histoire ou même que les autres personnages participants de ces épisodes les plus représentés comme Jules César, Octave ou Antoine.
· Son profil historique et la position spécifique qu'elle a dégagés, semblent faire d’elle un personnage spécialement attractif pour les différentes attitudes autour de la définition sociale des femmes et leur accès au pouvoir politique :
-elle est très citée par ceux qui cherchent des exemples avec lesquels soutenir sa condamnation à la morale et les capacités de "la" femme,
-mais aussi par certains courants expressifs et certains auteurs et interprètes qui ont dégagé un rôle important dans le traitement et la défense des qualités et de la visibilité politique et sociale de la population féminine :
- elle est une protagoniste fréquente dans des genres artistiques clefs dans le progrès de la considération sociale de la femme comme la poésie de l'amour courtois, la tragédie et l’opéra baroques ou la littérature et la cinématographie des XXe et XXIe siècles;
- elle est choisie par certains artistes spécialement éminents dans l'évolution de la construction des personnages féminins (comme Plutarque, Dante, Shakespeare, Artemisia Gentilleschi ou Bernard Shaw);
- des comédiennes et interprètes emblématiques de certaines époques ou des revendications populaires de la femme (comme Georges Sand, Colette ou Joséphine Baker par rapport aux déséquilibres parmi les hommes et les femmes, ou Tina Turner par rapport à la lutte contre la violence machiste), aussi partagent l’élection des traits de Cléopâtre comme caractérisation référentielle.
Ensuite nous résumons les caractéristiques principales des représentations artistiques de Cléopâtre le long de son Histoire, une étude évolutive et comparative dont l'exposition détaillée (accompagnée d'un recueil opportun et abondant d'illustrations) est incluse dans la version complète de cette recherche.
3.1. Les représentations de l'Antiquité. La naissance du double mythe : la leader capable et la courtisane perverse.
Au premier siècle av. J.-C. se fondent les deux lignes principales de représentation de cette figure, identifiées aux deux principaux groupes politiques confrontés pour le contrôle de l'Égypte. Trois points de contraste nous servent à différencier ces deux attitudes :
· le portrait politique officiel de la dirigeante vs. la caricature et l'insulte;
· l'épouse légitime vs. la courtisane qui se sert impudiquement de l'homme pour élever sa position;
· le visage et la tête couronnée comme emblème principal de représentation vs. le sexe exposé et utilisé comme un instrument de promotion.
En commençant par les représentations favorisées par Cléopâtre elle -même et son appareil de propagande, nous soulignons que :
1. Dans l'analyse des exemplaires conservés de reliefs, statues et stèles, construits par ordre de Cléopâtre[28], nous pouvons détecter une ligne cohérente de communication politique à travers l'art, fondée sur deux caractéristiques fondamentales :
-elle suit la tradition des Ptolomés de faire attention au symbolisme égyptien du monde pharaonique mais aussi aux Canons de l'esthétique hellénique caractéristique de la dynastie;
-pour identifier la reine avec les standards de pouvoir politique et d’origine divine, il y a une conciliation des éléments masculins et féminins autour de la souveraine :
- les premiers satisfont les attentes devant l'image traditionnelle partagée du leader politique,
- l'exaltation de la féminité soutient l'association iconographique des reines pharaoniques avec certaines figures religieuses féminines comme Isis ou Hathor, des porteuses de vertus comme la force fécondatrice, l'aptitude pour la lutte et la sagesse.
2. Dans les chroniques romaines de Plutarque et ses successeurs (les seuls historiens de l'Antiquité dont nous conservons des allusions à Cléopâtre) nous trouvons des portraits qui la rappellent comme quelqu'un de très habile et informée de l'importance sociale de l'image et des récits. Dans cette ligne, elle-même semble renforcer une grande partie des légendes sur sa sensualité et son goût pour le luxe démesuré aux fins de propagande, en maniant les préjugés de ses adversaires pour son propre bénéfice[29].
À Rome l'image de la reine semble difficile depuis sa relation avec Jules César et les échantillons publics de reconnaissance que celui-ci fait de son pouvoir[30]. Après le meurtre de l’empereur, la rivalité entre ses successeurs triunvirs trouve chez la reine égyptienne l'un des sujets principaux d’affrontement de propagande : dès qu'Antoine se marie avec elle par le rite égyptien, Octave accorde un rôle éminent à la propagande de diffamation, l'origine de l'un des courants les plus fertiles de la représentation de Cléopâtre le long des vingt-et-un siècles postérieurs. Naît ainsi le mythe de la regina meretrix : la légende de l'ambitieuse courtisane qui se sert des mauvais arts exotiques et érotiques pour désactiver les vertus de l'homme et pour l'utiliser comme un instrument d'ascension politique. Les auteurs principaux de cette ligne de représentation sont des figures clefs de la culture romaine comme les poètes Horace, Properce ou Ovide, les historiens Titus-Livio, Virgilio et Flavio Josefo[31] ou le philosophe Sénèque.
Le moraliste Plutarque dégage un rôle particulier après avoir incorporé des différences significatives par rapport à ses contemporains : dans les Vies de Demeter et d'Antoine, il parle de la souveraine lágide en fondant le patron le plus influent pour la naissance du mythe que nous connaissons aujourd'hui. Même sans s'occuper d'elle comme protagoniste explicite d’aucune de ses biographies, il trace un portrait psychologique minutieux et détaillé où il donne la forme au canon artistique régnant jusqu'à l'arrivée de la Cléopâtre de Shakespeare au début du XVIIe :
· en plus de la sensualité réitérée, d'autres traits supérieurs de la reine sont l'intelligence, l'habileté sociale et communicative et son bon maniement des principales langues de la scène politique de l'époque;
· sa relation avec Antoine est définie comme une histoire sincère et dramatique d’amour, un aspect clef, ceci pour son évocation postérieure comme héroïne tragique et noble;
· le suicide se présente comme une sortie pour se défendre de l'outrage et l'humiliation et non comme un aspect de faiblesse ou honte[32].
3.2. Les résumés historiques du Moyen Âge et la réinterprétation du premier humanisme chrétien : la Cléopâtre pécheresse, le prix du héros et les origines de la reine savante et martyr.
Durant le Moyen Âge et le premier Humanisme, le motif de Cléopâtre sert comme véhicule de trois lignes principales de discours :
· La plupart des représentations héritent du regard négatif créé par les auteurs romains, mais en substituant maintenant la charge morale antipatriotique par les nouvelles interprétations qui se détachent du regard chrétien[33]: son identification avec l'union de l'amour et le sexe est étiquetée conformément au péché, le nouvel ennemi de l'ordre social. Ce nouvel élément du personnage donne un pied de nez à une longue liste d'auteurs qui situent la reine égyptienne (luxurieuse, suicidaire, parricide même) comme une représentante des condamnés à l'Enfer :
-Isidoro de Sevilla, Vincent de Beauvais, Orose, et, surtout, Dante Alighieri, Petrarque et Boccace sont les principaux auteurs littéraires de cette ligne de représentation;
-les maîtres miniaturistes qui illuminent les textes de ses auteurs-ci se font remarquer comme les premières références plastiques de la Cléopâtre pécheresse (renforcée comme personnage condamné au moyen des conventions comme la caractérisation contemporaine des vêtements ou la présentation simultanée des scènes de son suicide et celui d'Antoine).
· En se séparant de cette première ligne, de brèves mentions apparaissent dans des révisions historiques ou dans la littérature courtoise où les éléments négatifs de la « reine pécheresse » sont éludés pour la présenter comme un épisode de réussite et évaluation du héros Jules César. Comme remarque Arnold Hauser, le monde courtois de cette étape est consolidé, en face des espaces religieux ou militaires, comme « une culture spécifiquement féminine »[34]. Cette ligne de représentation reprend les aventures de la jeune fille Cléopâtre dans une série d'oeuvres qui seraient inaugurées au XIIIe siècle avec comme exemple Li Fet des Romains et qui trouve ses principaux auteurs en Jean de Thuin et Jean Mansel[35].
· En troisième lieu, nous trouvons un groupe minoritaire mais très important d'auteurs qui soulignent la noblesse de la reine, en l’incluant entre les héroïnes martyrs de l'Histoire Ancienne : c’est un ensemble de textes peu copieux mais de grande importance par son caractère pionnier, où Cléopâtre est valorisée par ses vertus de personnalité et d'intellect, dans lequel se font remarquer des auteurs comme l'encyclopédiste chiíte au-Masu'di (Les Prairies d'or), Geoffrey Chaucer (The Legend of Good Women) ou Gower (Confessio Amantis).
3.3. Les XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles : l'héroïne tragique, le mysticisme amoureux, l'enchanteresse maîtresse de la séduction et la dame-stratège.
Le XVIe siècle renforce et agrandit ce dernier regard compréhensif et admiré vers le personnage. Nous pouvons rattacher cette évolution au retour d’une grande partie des territoires européens à une certaine stabilité des structures sociales et économiques, un phénomène qui engendre un certain éloignement de l’ancien discours des institutions religieuses. En ce qui concerne la représentation de Cléopâtre, les nouvelles préoccupations se traduisent dans d’autres interprétations du personnage où nous pouvons détacher quatre lignes générales :
· triomphe le caractère tragique du suicide, doté maintenant d'une auréole héroïque;
· la face perfide et destructive du personnage est estompée au bénéfice d'une nouvelle lecture de ses idylles comme des symboles de l'amour fidèle et sincère;
· l'évocation du personnage comme un prétexte pour développer un portrait de sensualité et de faste trouve dans les scènes des rencontres (le débarquement à Tarso et le banquet de la perle, principalement) des motifs très opportuns, dépourvus déjà de la critique morale romaine et médiévale;
· l'évocation du profil séducteur de la reine ne se limite pas seulement à sa sensualité physique, mais elle souligne aussi le répertoire d'habiletés persuasives et intellectuelles déjà pointé par Plutarque.
L'impact de cette nouvelle lecture positive de Cléopâtre est si puissant qu'elle se maintient jusqu'aux fins du XVIIIe : la Renaissance, le Manierisme, le Baroque et le Néo-classicisme répartissent, depuis sa diversité, une admiration partagée vers la reine égyptienne. La condamnation morale vers le profil voluptueux et sexuel du personnage ne disparaît pas tout à fait, mais elle paraît se reconduire : ou bien cette condamnation est revêtue par une dignité tragique (Jodelle) ou elle reste reléguée à un aspect si minoritaire et obsolète qui est plus proche de la plaisanterie qu'à l'énoncé doctrinal (Rabelais, Gaspard Isaac). Il faut considérer que le fait que certaines et nombreuses dames de la haute classe se font représenter dans des portraits publics dans des attitudes « à la manière de Cléopâtre », démontre que les traits de condamnation morale associés à la reine égyptienne perdent une certaine force (Michel Angel, De Troy, Reynolds).
Par rapport au profil tragique et noble, nous pouvons grouper de la façon suivante les auteurs et les recours expressifs qui construisent ce profil :
· Se font remarquer certains dramaturges fondateurs de la tragédie du XVIe comme Trissino, Spinello, Jodelle, Cintio ou Pistorelli, les promoteurs d'une ligne de représentation qui culmine au début du XVIIe avec la représentation référentielle du personnage : The Tragedy of Anthony and Cleopatra (1606-1607) de William Shakespeare.
· Dans une connexion avec ce profil nous trouvons aussi les abondantes représentations plastiques de Cléopâtre comme motif de portraits féminins tragiques, comme intégrant des dénommées « galeries de femmes fortes » ou comme la protagoniste des scènes chorales destinées à rendre hommage à sa grandeur et valeur. Dans ces représentations il y a deux aspects qui résultent spécialement détachables :
1. Pendant la Renaissance et le Baroque, son traitement se concentre dans le motif du suicide tragique et louable (Barbieri, Di Jacopo, Del Conte, Gentileschi, Cagnacci, Vignon, Mazzoni, Jordaens, Rivalz, Hamilton)[36].
2. À partir de son identification avec certains groupes de femmes de l'Histoire et de la mythologie, Cléopâtre est associée maintenant aux vertus exemplaires :
- le sacrifice par l’amour et la loyauté à un homme qui vient de mourir est associé à Cléopâtre après son identification avec Sofonisbe, Judith, la femme d'Asdrúbal ou Porcia, (comme nous trouvons dans les séries du recueil Chigi-Sarracini, dans celle de Beccafumi ou dans celle de Benvenuto Cellini, des principes du XVIe);
- elle devient un symbole de l'honneur quand elle forme un couple thématique avec Lucrèce (Jacopino Del Conte de la deuxième moitié du XVIe, des tailles en bois de Tabley House du début du XVIIe);
- elle est même liée à la Force et la Justice, grâce à la présence de personnages allégoriques de ces valeurs, comme nous trouvons dans les tapisseries de la maison Hardwick (XVIe)[37].
L'autre des dimensions influentes développées dans cette période est le profil de l'héroïne comme un symbole de l'amour passionné et sincère. En face de la version de perte de prestige des chroniqueurs romains défensifs d'Octave, la Renaissance rachète certains aspects de la biographie de Cléopâtre comme des exemples d'épisodes d’un amour unique et fascinant. Nous devons souligner ici que ceci est le profil principal de Cléopâtre dans le genre naissant de l'opéra que, à son premier siècle de vie, le XVIIIe, met à profit la déjà confirmée puissance théâtrale du personnage dans une formidable collection de Cléopâtres chantées : le librettiste Capon et des compositeurs comme Canazzi, Castrovilari, Sartorio, Kusser ou Mattheson sont les premiers auteurs de ce type de représentation, des antécédents de la récréation faite par Händel et Haym pour l'opéra Giulio Cesare, la première grande référence musicale du personnage grâce à la riche gamme de registres émotifs avec lesquels ils retraitent la reine égyptienne.
Un troisième trait important développé chez la reine égyptienne par les dramaturges de la Renaissance et le Baroque est son habileté aux rencontres personnelles:
· le débarquement à Tarso et le banquet de la perle (Elisabetta Sirani, Cignani, Allori, de Bray) sont consolidés comme des motifs à la mode avec lesquels représenter des scènes de faste sous le prétexte d'évoquer le pouvoir de séduction et la richesse débordante de Cléopâtre;
· son dernier rendez-vous avec Octave montre la grandeur du conquérant (capable de se débattre face à ces charmes que ni César ni Antoine n’ont pu vaincre), mais aussi une attention accordée à l'intelligence communicative d'une Cléopâtre déjà fille de la tradition littéraire de cette période et qui, pour la première fois dans l'art pictural, centre son action dans le discours parlé (Da Cortona, Mengs, Gauffier).
3.4. La Cléopâtre fatale de l'univers du XIX siècle.
En contrastant avec l'héroïcité et la noblesse avec laquelle les artistes des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles dépeignent Cléopâtre, l'univers romantique et symboliste de l'occident du XIX siècle voit en elle l'incarnation idéale de la femme fatale. La présentation abondante de Cléopâtre comme représentante de cet archétype féminin (un mélange stratégique d'imagination sexuelle et de sanction officielle) peut être synthétisée par les points suivants :
· Encore une fois, elle est profilée comme une ennemie de l'ordre et des structures qui assurent le bon fonctionnement de la société, et sert ainsi comme un motif avec lequel prévenir des dangers associés culturellement à la femme : l'excès, l'inconnu et l'activité sexuelle sans un « contrôle institutionnalisé ».
· Comme femme appartenant au niveau du pouvoir politique et de l'autonomie économique, et « donc » négligente des « vraies missions et les tâches féminines », elle est retraitée comme un être dévasté par le dégoût qui utilise sa position d'autorité pour trouver des expériences excitantes : les aventures brutales et affolées qui ont comme objet la destruction de l'homme.
· Le mythe de la regina meretrix est de nouveau exploité, en développant fortement le profil de la reine assassine, une femme monstrueuse dépourvue d’empathie et de morale qui atteint la jouissance en tuant ses amants d'une nuit : à partir de Sextus Aurelius Victor, les écrivains Pushkin et Gautier sont les promoteurs de ce mythe du XIX siècle, suivis par un grand ensemble d'artistes comme les peintres Cabanel et Avril, le compositeur Massé ou le chorégraphe Fokine.
· Ses évocations montrent un résumé complexe d'inquiétudes et de mythes, commun au reste de personnages identifiés par l'époque avec « la femme libérée et avec pouvoir ». Fréquemment, les textes montrent une association confuse entre les signes d'identité des premières révolutionnaires du XIXe siècle (la revendication du droit à voter, l’indépendance économique, la reconnaissance de travail ou la liberté d'élection sexuelle) et les traits des dangereuses et sadiques femmes fatales: « Écoutez-moi, parce que je suis celle qui vous offre l'égalité », arrive à dire la Cléopâtre du XIX siècle avant de dicter les normes de son jeu macabre aux trois aspirants qui sont disposés à mourir pour une nuit de plaisir dans son lit[38].
· En face de l'iconographie plastique antérieure (la placidité émouvante de la Renaissance, la passion héroïque baroque et la tempérance néoclassique), la construction des mouvements du corps et du visage de Cléopâtre revient à montrer la méfiance sociale envers la femme qui n’est pas « conventionnelle ». La reine qui montre des richesses et du pouvoir et décide sur sa sexualité et sa destinée, est évoquée obsésivement avec la caractérisation externe et le patron d’expression de la femme fatale :
-l'énigme et l'ombre obscurcissent ses yeux (nous l'apprécions dans les portraits picturaux de Delacroix, Böcklin, Waterhouse ou Conssard, et dans les photographies publicitaires de Sarah Bernard, Collete ou ses héritières du siècle suivant, Ida Rubinstein ou Theda Bara);
-le dégoût et le vide vital de mécontentement éternel se convertissent en son attitude corporelle réitérée (Moreau, Alma-Tadema, Avril);
-la nudité et l'exotisme sont les éléments principaux de son vestiaire, mais une ligne de représentation masculine est aussi inaugurée, ambiguë en ce qui concerne la caractérisation des coutumes sexuelles de la reine (Gautier, Massenet-Payen).
3.5. L'icône-Cléopâtre : vers le débat de la « superwoman» et le drapeau de revendication sociale.
Avec le déroulement du XXe, l'évocation de la reine se sépare progressivement de l'archétype de la femme fatale pour servir comme un véhicule de nouveaux discours, attentifs aux revendications progressives et aux conquêtes sociales des femmes. Si d'avance elle était évoquée comme illustration des conduites ennemies de l'ordre, maintenant elle semble particulièrement opportune et « rentable » pour syntoniser avec de nouveaux énoncés à propos de l'intégration des femmes dans des sphères traditionnellement masculines.
La littérature et la cinématographie sont les principaux langages artistiques responsables de la popularisation de cette métamorphose du personnage, dont les éléments les plus détachables sont :
· La légende sur la beauté et le drame d’amour du personnage sont toujours des ingrédients indispensables de son portrait artistique, mais l'intérêt pour ses autres facettes (avec un poste spécial pour sa dimension politique) acquiert une importance de plus en plus remarquable : Cléopâtre devient un motif fréquent chez la question sur la place de la femme dans la société, un débat que l'Occident vit dans ce siècle d’une façon croissante et renouvelée[39]).
· Les récits accordent progressivement beaucoup plus d’attention à retraiter le bagage personnel et l'instruction intellectuelle et communicative de « la femme préparée pour devenir une dirigeante» : une grande partie des auteurs commencent le portrait de la souveraine depuis sa jeunesse pour réfléchir autour de ses orientations politiques et instructions. Nous le trouvons dans les textes de Shaw, Wertheimer, Von Hanstein, Dufour ou George et dans les films de Pascal, De Mille ou Mankiewicz : même avec des différences remarquables, ils considèrent tous opportun de montrer que Cléopâtre voit renforcées depuis son enfance certaines dots spéciales pour le leadership et qui sait s’entourer du conseil expert des philosophes ou des militaires pour se former dans ce dessein.
· Grâce à cette lecture grandiose et combative, Cléopâtre devient aussi une icône d'autres mouvements sociaux de revendications, parallèles et historiquement associés aux conquêtes civiles des femmes, comme nous le trouvons dans l’exemple de la communauté noire des États-Unis.
· Le personnage permet que les artistes, producteurs et annonceurs contactent le nouveau public féminin en faisant attention d'une forme simultanée à deux aspects parfois opposés :
-son profil satisfait les attentes de certains publics désireux de trouver des personnages féminins actifs, emblématiques de l'incorporation de la femme aux sphères traditionnellement masculines et influentes par des questions politiques et des habiletés intellectuelles;
-en même temps, elle semble aussi opportune comme un prétexte avec lequel continuer d'annoncer et de répandre des produits associés aux valeurs et qualités les plus soulignées par l’ancienne distribution de rôles masculins et féminins (l'attention à la beauté physique, le soin sophistiqué de la toilette...).
· Son histoire est utilisée comme un exemple fréquent avec lequel réfléchir à propos des implications que l'orientation au leadership et le pouvoir politique peuvent avoir pour « la femme ». Dans des termes généraux, les représentations de cette période peuvent être groupées dans trois phases :
1. Autour de la décennie de 1930, la représentation partagée de la femme avec un fort pouvoir politique dans un cadre social traditionnellement masculin présente Cléopâtre comme la victime de deux forces opposées, qui subit l'impact du renoncement aux parcelles intrinsèques de « réussite vitale féminine» et qui finit par choisir l'amour et la famille pour être « vraiment heureuse ».
2. Dans les décennies suivantes, plus nombreux sont les textes qui, même s'ils reconnaissent les énormes difficultés sociales et de la vie privée, de ce type de personnage, ils ne localisent pas la solution dans le renoncement à une de ces deux sphères.
3. À la fin du XXe et des débuts du XXIe nous trouvons des récits qui veulent voir chez Cléopâtre l'exemple d'une femme supposée idéale, capable de lutter avec succès sur tous les fronts, en luttant plutôt contre le manque de compréhension ou la rivalité, dont ceux qui l'entourent, qu'avec un débat interne de priorités vitales. Dans le contexte de production de ces nouvelles narrations, nous considérons important de détacher la façon dont laquelle la littérature scientifique de divulgation ou le documentaire historique soulignent l'image de la « vraie Cléopâtre » et de la « surprenante modernité » de sa société[40].
· Le motif de Cléopâtre illustre l'expression de deux questions constantes dans le débat sur les politiciennes au XXe siècle :
1. La première, veut savoir si ces figures ont une forme « féminine » de l’exercice politique, ou si, au contraire, elles se transforment en une sorte de femme masculinisée (l'exemple de Cléopâtre, en fait, est utilisé comme une démonstration des deux attitudes opposées).
2. La deuxième, parle du type de conflits que ces dirigeantes doivent affronter par le fait spécifique d'être des femmes[41] : en suivant Shakespeare, beaucoup de récits parlent de la méfiance et des préjugés qui entourent la reine dans son environnement le plus proche, de l'humiliation sexuelle à laquelle ses ennemis veulent la soumettre ou de l’insécurité et de la rivalité qui s'éveillent parfois chez ses compagnons sentimentaux.
· S'intensifie l'association entre ses rôles politiques et historiques et des valeurs comme l'indépendance, la lutte pour l'autonomie vitale et la défense de la capacité de direction sur la destinée personnelle. Dans ce sens il faut souligner que les évocations de Cléopâtre se multiplient dans les récits qui ne traitent pas strictement d'elle mais qui utilisent son nom pour des personnages féminins qui luttent pour s'approprier ce type de valeurs : nous le voyons chez la protagoniste de la comédie Cleopatra (Mignogna, 2003); dans les biographies de la chanteuse Josephine Baker (le Jazz Cleopatra, Rose, 1991) ou l'actrice Zoe Caldwell (Je Serai Cléopâtre, 2001); dans la série de la télévision de science-fiction Cleopatra 2525; ou dans les produits qui, depuis la moitié du XXe, ont crée des personnages féminins afro-américains contemporains baptisés avec le nom de la reine égyptienne comme un drapeau de revendication d'une origine de gloire et de force vitale (Cleopatra Jones, Set it Off)[42].

4. La femme de pouvoir comme une division insoluble : Cleopatra de Cecil B. De Mille (1934).
La première des analyses intensives que nous présentons dans notre investigation est celle du film Cleopatra, réalisé par Cecil B. de Mille aux États-Unis et présenté en 1934. Comme résultat de son analyse individuelle et de sa comparaison avec d'autres types de documents représentatifs de son contexte de production et de première réception, nous observons que la représentation de De Mille réunit une série significative de caractéristiques qui sont articulées autour de deux éléments principaux :
· ce que le discours le plus répandu de son époque identifie avec « la vraie nature féminine »,
· et la confrontation de telles idées avec certains rôles et activités sociales traditionnellement considérés comme masculins et « incompatibles » avec le déroulement heureux du personnage « puisqu’elle est une femme ».
Conformément au choc entre ces deux pôles de définition, nous soulignons la Cléopâtre de De Mille comme une représentante d'un archétype important avec lequel la femme avec un fort pouvoir social et politique a été souvent définie comme la victime d'une dichotomie irréconciliable entre deux sphères vitales: « la reine » (et d'ici nous pourrions acheminer d'autres profils, comme la travailleuse qui s'emploie en dehors de la sphère domestique ou la leader de revendications sociales) est présentée comme ennemie absolue de « la [vraie] femme ».
Cet énoncé apparaît dans des moments fréquents de l'Histoire, chaque fois que le débat sur la capacité de leadership et de souveraineté des femmes inaugure un nouveau chapitre. Dans ce sens, le texte choisi appartient à une période sociale particulièrement représentative de ce conflit. On parle de la situation et de la définition collective des femmes dans le cadre occidental parmi les deux Guerres Mondiales, une période où les femmes vivaient une tension complexe provoquée par la contradiction entre deux forces sociales:
· celles qui essayaient de restaurer le rôle féminin traditionnel
· et celles qui, au contraire, luttaient pour l'accès aux universités, la participation politique et l'égalité salariale de travail.
Nous pouvons synthétiser cet épisode complexe historiquement et socialement à partir des points suivants :
1. Dans la décade de 1930 quelques pays occidentaux avaient dans son histoire récente des progressions importantes dans la reconnaissance de l'égalité sociale des femmes. En ce sens, les nord-américaines avaient conquis des fronts éminents dans les décennies antérieures entre lesquels se fait remarquer l'obtention du droit de vote en 1919[43]. .
2. L'actif et efficace rôle dégagé par la population féminine devant les nécessités sociales vécues pendant la Première Guerre Mondiale ouvre un nouveau chapitre dans le débat culturel sur les capacités des femmes. Durant le conflit et dans les premiers mois de paix, tous les gouvernements participants reconnaissent le travail dégagé par ses citadines :
· les femmes n’ont pas seulement soutenu les familles, mais, une propre demande des autorités, elles se sont occupées des fabriques, des affaires et des hôpitaux quand les hommes ont dû se présenter à l’armée;
· chaque pays a eu ses héroïnes de guerre, participant au déroulement de certaines opérations contre l’ennemi.
3. Cependant, dans les mois d'après-guerre, les pays doivent faire face à une terrible crise économique et sociale qui agit comme un élément principal de confrontation collective à ces progressions de la population féminine. Les mêmes nations qui reconnaissent le rôle que leurs femmes ont dégagé durant la guerre, exercent en même temps un fort effort pour obtenir qu'elles abandonnent les universités et les postes de travail pour le foyer. Comme concrétion de ce processus, il faut détacher les aspects suivants :
· Certaines des mesures les plus significatives de la progression, comme la reconnaissance de la nécessité d'égalité dans les salaires pour des hommes et des femmes défendus par le traité de Versailles (1919), ne sont pas soutenues par la majorité des pays signataires.
· Ces femmes qui avaient commencé à lire les nouvelles interprétations sur leur psychologie et leur sexualité, doivent affronter aussi des discours déconcertants qui, même dans les sciences modernes, semblent asseoir des valeurs du passé.
· Il y a une confrontation difficile entre la défense des méthodes contraceptives et l'effort que beaucoup de gouvernements emploient pour consolider la maternité comme la grande (même l'unique) fonction digne de la femme, à travers de forts programmes de propagande comme les prix pour la mère de famille nombreuse ou les fêtes nationales du « jour de la mère ».
Dans ce contexte, l'héroïne des narrations artistiques dédiées aux loisirs se meut aussi parmi ces deux pôles de tension :
· les romans et les films font référence aux « nouvelles femmes », ingénieuses et entreprenantes, qui sont composées sur le marché de travail d'une façon beaucoup plus prononcée que dans les époques antérieures,
· mais la grande majorité des textes (avec un poste particulier pour les genres romantiques et noirs) conserve, dans son discours profond, l’idéal traditionnel d'héroïne consacré à l'amour et à la famille.
La protagoniste du film que nous avons choisi comme l’exemple de ce discours est définie par quatre points fondamentaux :
1. Le positionnement de la femme dans l'axe « l’invasion vs. l’attraction ».
L'analyse textuelle réfléchit que l'axe « l’invasion vs. l’attraction » parle dans ce récit de l'attitude ou la stratégie que les personnages les plus éminents adoptent pour obtenir leurs buts. Le texte insiste pour situer seulement Cléopâtre dans le pôle de l'attraction et César, Antoine et Octave dans l'opposé.
Dans le récit, ce positionnement du personnage est caractérisé par trois aspects fondamentaux :
· La stratégie de séduction « efficace » employée par Cléopâtre est limitée aux aspects érotiques, sans citer l’habileté de persuasion intellectuelle que, conformément à certaines chroniques de l'Antiquité, la reine a dû dominer.
· Cette capacité de séduire et d'utiliser sa sexualité comme outil de pouvoir est l'unique adresse politique du personnage :
-d’autres facettes (comme les militaires, le leadership religieux ou la communication dirigée aux amples publics) sont éliminées ;
-son attitude d'attente et de séduction s'oppose, comme « la façon féminine », au déplacement offensant et les réactions actives des hommes de la trame.
· Cette stratégie de séduction féminine est définie (et accusée) comme quelque attitude cachée, destructive et moralement censurable, alors que les actions de guerre et stratégiques des deux personnages principaux masculins ne sont pas évaluées par aucun agent du texte (ni du point de vue de sa noblesse éthique ni de celui de ses possibles conséquences de destruction).
Conformément à ces éléments et dans une consonance avec d'autres textes de l'époque, le récit semble imprimer un énoncé comme le suivant : si la protagoniste féminine atteint et exerce le pouvoir avec l'unique outil dont elle dispose comme femme (son attrait physique et son habileté pour le manier) et cela est un instrument dangereux et destructif utilisé comme elle le fait, il semblerait que la femme qui poursuit le pouvoir est, par sa propre limitation, dangereuse et destructive.
2. Le positionnement de la femme dans l'axe « le pouvoir vs. l’amour ».
Ce deuxième axe d'opposition est utilisé dans le texte comme un trait spécialement éminent dans la définition de la femme orientée vers le pouvoir social ou politique. Conformément aux fréquents textes insérés dans le débat à propos des femmes qui dégagent ce type de rôles, celles-ci seraient des êtres incomplets, immergés dans un contexte qui n'est pas le leur et qui est régi par ceux qui sont essentiellement formés pour poursuivre ladite motivation de leadership.
Les éléments principaux qui, dans le texte, construisent cet énoncé peuvent être synthétisés de la façon suivante :
· L'une des marques principales avec lesquelles le texte montre les manques vitaux auxquels Cleopatra s'expose par son dégagement d'un rôle de pouvoir est l'omission de la maternité et le mariage entre leurs sphères vitales, en contredisant le référant historique.
· L'analyse des énoncés du langage corporel, la composition du plan ou de la musique et sa comparaison postérieure avec des discours généralisés dans son contexte social de production, nous indiquent que l'évolution du personnage dans cet axe est soutenue par le déroulement de deux autres paires de concepts que le texte présente aussi comme des opposés :
- « la maîtresse vs. l’épouse »
- « la reine vs. la femme"
Ces axes tracent une trajectoire selon laquelle Cléopâtre atteindrait son but authentique et « essentiel » seulement quand elle devient une « vraie femme ». Les éléments avec lesquels le texte identifie tel stade sont :
· La reconnaissance dont sa motivation principale (et exclusive) est l'amour et, « donc », renonce à la sphère du pouvoir.
· La subjugation à l’amour est identifiée dans le texte à l’attitude de la « vraie épouse », comme nous l’observons après avoir comparé la position corporelle de Calpurnia et celle de Cléopâtre dans leurs moments respectifs de plus grande intensité dans l'expression de l'amour.
· Le désir ardent de soumission devant l’homme qui réussit à la transformer en « femme authentique », identifié par certains éléments du récit (comme les chaînes de l'atrezzo ou le deuxième thème musical de caractérisation de la protagoniste) avec un « esclavage » explicite que la femme chercherait pour soi-même dans la relation de couple.
· L'invitation à l'agression physique comme un moyen normal et désirable de l'approche sexuelle.
Il ne semble pas que le scénario et la réalisation de ce film considèrent comme potentiellement dangereux pour ses propres intérêts de popularité des éléments comme la défense d'un déséquilibre entre les amants au détriment de la considération de la femme ou l'insinuation de l'agression physique vers celle-ci comme un élément demandé. Et celui-ci nous semble un indicateur éminent de l'état de l'attention qui existait vers ce type de problèmes chez le contexte précis de création de ce récit. Il faut considérer qu'au milieu de la décennie de 1930, un discours dans lequel la femme demande explicitement à son compagnon un traitement de cette nature n'implique pas d'intention provocatrice ou d'une dénonciation, mais il réfléchit juste (et, à la fois, il soutient) des formules fréquentes dépourvues de toute intention de scandale.
3. L’identification de la période biographique la plus « intéressante » du personnage exclusivement avec son interaction romantique.
Le contraste entre la trame du film de De Mille et son référant historique, ainsi que certains éléments du récit comme l'est l'image d'ouverture sur laquelle le titre est imprimé, nous permettent d'observer que le texte construit sa représentation de Cléopâtre en la limitant à la relation de celle-ci avec ses deux amants romains : la narration élimine toute allusion à la vie de la protagoniste concernant ses dix-huit premières années de vie, à son règne en solitaire (compris entre la mort de César et son union avec Antoine) et, même, aux jours qui se sont écoulés entre le suicide de son deuxième époux et le sien. Ces décisions révèlent une tendance de définition collective de la femme à travers des textes artistiques que tournent en invisible des facettes importantes de son déroulement personnel et de ses possibilités d'influence sociale et politique qui sont différentes de celles localisées dans le cadre du privé.
4. L’argumentation de la femme-leader comme une créature exceptionnelle et l’identification de la « nature féminine » avec l'orientation exclusive vers l'amour.
Dans notre révision contextuelle, nous détectons une tendance contradictoire qui, dans le cadre occidental des années trente, reconnaît la valeur de la contribution sociale de certaines femmes mais en les définissant tout de suite comme des cas exceptionnels avec lesquels « confirmer la règle » ou, même, controverser les avantages de telles caractéristiques personnelles. En consonance avec ce trait, le film de De Mille montre une évolution dans la définition de sa protagoniste :
· dans la présentation du récit, quand la sphère politique du personnage s'accentue, le texte souligne que Cléopâtre n’est pas comme les autres femmes, un aspect que le texte exprime explicitement au moyen des mots justificatifs de César et aussi, et surtout, avec l'absence totale des antagonistes ou des auxiliaires féminines importantes avec lesquelles la protagoniste pouvait être comparée;
· l’analyse du « progrès » de Cléopâtre dans la narration conduit à la définir comme un personnage qui, finalement et conformément à sa « vraie nature », choisit (et conseille) de « tout remettre » au lieu de la « fortune de l'amour » (nous citons des mots textuels du scénario de Lawrence et Young).
Comme nous l’observons dans notre analyse, cet énoncé s'assoit sur deux éléments :
· Cléopâtre n'a pas de rivales comparables avec ses buts ou ses capacités :
-Ni Calpurnia, ni Octavie sont, chez De Mille, de vrais adversaires de l'héroïne, puisqu'elles ne disputent pas du même objet de rivalité avec Cléopâtre : le texte élimine tout conflit, même par rapport à la lutte romantique.
-Elles n'apparaissent pas non plus, les autres adversaires féminines politiques qui ont existé dans le référant historique, comme les princesses Bérénice ou Arsínoe, les soeurs de Cléopâtre qui ont aussi concouru pour le pouvoir en solitaire.
· La comparaison de l'héroïne avec le reste des personnages féminins du texte nous conduit à sa relation avec les auxiliaires Charmion et Iras, dont la fonction de définition de Cléopâtre se concentre dans trois points:
-aider la protagoniste dans les activités d’embellissement physique,
-agir en miroir de son état émotionnel,
-agir comme les destinataires du discours final de la reine, où Cléopâtre conseille (seulement aux femmes, puisque les accompagnateurs masculins ont été éliminés de la scène) « qu’elles leur remettent tout » si elles sont «bénies» avec le vrai amour.

5. La leader comme une « femme fatale » dans l'opéra Cléopâtre de Jules Massenet et Louis Payen (1912-1914)
Le deuxième texte choisi comme objet de l'analyse individuelle est l'opéra Cléopâtre, créée par le compositeur Jules Massenet et le librettiste Louis Payen (pseudonyme d'Albert Liénard) et présenté en France en 1914. Il s'agit de l'un des textes du corpus de portraits de Cléopâtre qui représente le mieux ce discours si étendu qui identifie les femmes qui exercent le pouvoir avec celles qui poursuivent la substitution et la destruction de l'homme.
L'archétype narratif d’une femme qui, outre les normes sociales, séduit et dévie l'homme jusqu'à le détruire, est présent dans des traditions les plus anciennes de récits folkloriques, mythologiques et religieux[44]. Il y a quatre aspects qui nous semblent spécialement éminents dans l'étude sociologique de ce type de personnage :
· L'analyse de ses attributs et évolution permet de détecter fréquemment le répertoire d'éléments considérés par les différents groupes sociaux comme inacceptables et condamnables chez une femme.
· La représentation de cet archétype se sépare rarement de la perception que ces groupes ont du maniement de l'indépendance et du pouvoir social par des femmes.
· Cet archétype offre un portrait significatif de l'ignorance et du rejet contenus dans le concept collectif de la femme qui existe dans diverses époques. Cette réaction a empêché de séparer et de s'occuper d'une façon individuelle des questions différentes qui, dans l'ample population féminine, pouvaient toucher aux unes et aux autres. À travers cette figure de la femme fatale, l’imaginaire collectif a produit des mélanges confus dans lesquels des thèmes comme la recherche d'indépendance économique et civile, la jouissance sexuelle ou le déroulement d'activités scientifiques et professionnelles sont identifiés avec des problèmes sociaux comme les maladies de transmission sexuelle, le rejet familier et social ou le délit et le crime.
· Cette figure est utilisée comme un véhicule efficace de l'une des stratégies narratives les plus demandées:
-exposer les attraits d'une sexualité féminine apparemment libérée et d'une force incontrôlée,
-avec le sauf-conduit (pour les auteurs, les producteurs et le public) de « condamner » cette conduite avec le châtiment du malheur personnel et avec les signes sociaux du rejet et de la punition.
Comme nous l’exposons dans notre étude panoramique, cet archétype a été l'un des plus répétés à l'heure de retraiter la reine Cléopâtre VII le long de vingt-et-un siècles. Pour analyser ce type de lecture nous avons choisi un cadre social particulièrement éminent dans la construction de l'archétype de la destructrice de l'homme : l'univers du XIX siècle et la scène française comme référant principal, avec Paris comme capitale culturelle d'Occident. Parmi l'ample corpus de cette période qui identifie Cléopâtre avec l'archétype de la femme fatale nous avons choisi le dernier grand opéra de Massenet, un auteur très opportun pour cette analyse sociologique :
· Il est fréquemment qualifié comme « le compositeur de la femme »[45].
· Son effort et la reconnaissance comme un grand connaisseur des attentes du public lui attribuent une pertinence extraordinaire à l'heure de détecter, dans des oeuvres artistiques, des discours très représentatifs d'un contexte social.
· Sa production (dans l'élection de sujets et dans l'élaboration du discours musical) développe un recueil abondant de personnages féminins qui combinent avec succès la formule de sexualité, l'usage frivole du pouvoir, le danger et la sanction ou la rédemption sociale: Marie Madeleine, Ève, Sitâ, Salomé, Manon, Esclarmonde, Thaïs, Fanny-Sapho et Barreda précèdent sa Cléopâtre fatale.
· Son succès contemporain de critique s'accompagne souvent d'une conscience exprimée dont ses personnages montrent une proximité accentuée avec la réalité française du moment[46].
Dans ce texte, le tableau de caractéristiques de Cléopâtre comme une femme qui utilise son pouvoir pour détruire l'homme reproduit le schéma étendu des sujets qui, selon des textes de caractères très divers, résumaient à l'époque les problèmes sociaux liés au « féminin ». Nous trouvons deux éléments constants qui semblent diriger cette confusion de thèmes :
· La combinaison de rejet et de fascination devant des questions sociales, biologiques et psychologiques inconnues autour des femmes.
· L'identification de « la femme » avec d’autres secteurs sociaux séparés du contrôle politique et économique, comme la population native des colonies, des classes travailleuses ou les secteurs marginaux des villes. En consonance avec le point antérieur, nous observons que ces secteurs étaient retraités dans un schéma contradictoire :
-ils étaient idéalisés comme une image utopique de délivrance et d'évasion devant les normes et les chaînes de la société bourgeoise;
-mais ils étaient aussi craints, comme des groupes sauvages, menaçants et ennemis des lois qui garantissent l'ordre social.
Comme concrétion de ces deux processus, le profil de la « reine fatale » de ce texte semble poursuivre la formule qui avait consacré son succès au grand opéra du répertoire français (Carmen de Bizet), synthétisé dans quatre caractéristiques principales :
1. La démonisation de la sexualité féminine comme l’origine des maladies de transmission sexuelle.
La sexualité des femmes devient une des questions principales traitées sous le prisme de cette ambiguïté radicale d'ignorance, crainte et fascination. Les maladies de transmission sexuelle sont l'un des plus grands dangers dans la société parisienne du XIXe siècle, où la croissance imparable de la prostitution provoque des épidémies terribles de syphilis qui changent la promiscuité en une affaire de conséquences létales. Dans le traitement collectif de cette question, nous percevons que le rejet est dirigé vers toutes les femmes sexuellement actives, sous les prémisses seulement du moyen d'une « répression totale de sa sexualité une femme pouvait échapper de la charge de ces associations culturelles »[47]. Le profil de Cléopâtre reproduit les deux composants principaux de ce schéma :
· L'identification des conséquences de la jouissance et de la passion sexuelles avec la contagion mortelle et la sanction sociale.
· Le positionnement du portrait des femmes, conformément à sa conduite sexuelle, dans l'un des deux pôles de l'axe suivant d'archétypes opposés :
-« l’ange du foyer », l'épouse correcte, heureuse dans une scène domestique idéalisée et séparée du désir sexuel (un rôle dégagé chez Massenet par le personnage d'Octavie, comme l’élément de contraste avec Cléopâtre);
-la prostituée, une figure de résonance extraordinaire dans la production artistique de l’époque[48].
Chez Massenet, le portrait que l'orchestre et le livret font de la reine, au moyen de la répétition de motifs musicaux et des interventions d'autres personnages comme Antoine ou Spakos, coïncide avec la représentation du XIX siècle d'une prostituée :
· Cléopâtre est constamment nommée par les vers et l'orchestre comme la « courtisane, courtisane couronnée », un terme qui dans ce contexte identifiait les maîtresses des anciens rois (qui ont disposé d'un immense pouvoir économique et politique) et aux figures contemporaines de femmes célibataires qui subvenaient à leur vie grâce aux relations sexuelles avec de hauts représentants de la politique et des arts français[49].
· Le texte parle fréquemment de sa promiscuité incontrôlée.
· La relation sexuelle implique chez Cléopâtre l'offre d’être une esclave de l’homme en même temps que le texte montre l'usage qu'elle fait du pouvoir de ses amants pour son propre bénéfice.
· Le texte décrit, au moyen de métaphores immédiates et puissantes, les effets nuisibles du contact sexuel avec elle :
-la "pâleur", les "lèvres blessées", la "folie" ou la "fièvre" qui, selon les vers de Payen, accompagnent ceux qui entrent en contact sexuel avec elle, sont des expressions poétiques des symptômes de la perturbation amoureuse ou de la réalisation sexuelle intense, mais aussi des allusions à certains des indices de la syphilis;
-conformément à la trame et à la mise en scène, les effets du premier contact avec Cléopâtre restent occultes pendant quelque temps, dans les replis internes et cachés, jusqu'à ce qu'ils se manifestent quand il est déjà trop tard pour sauver l'amant de sa destruction.
2. Le traitement associé du portrait de la femme fatale et celui des communautés colonisées.
L'univers du XIXe crée une puissante alliance métaphorique entre la sexualité féminine (personnifiée dans l'image de la femme fatale) et le monde lointain et exotique, dans une tradition artistique et intellectuelle qui voyait l'Orient comme une sorte de « zone libre » dans laquelle former ces projections conformément aux questions politiques, économiques et sociales[50].
Au-delà de sa convenable localisation égyptienne, les composants de cette identification exprimés dans le profil de la Cléopâtre de Massenet sont :
· Divers canaux de signification notent que le portrait est réalisé depuis et pour la perspective du groupe dominant :
- Le discours musical et scénique réserve aux signes du « romain » le rôle d'inaugurer et de fermer le texte et de juger les événements sous son schéma de normes.
- Cette position offre un portrait du regard que telle classe dominante a de soi-même: le groupe de force (le romain, masculin et républicain) est présenté dans sa normalité comme le porteur fidèle et serein de la rationalité et de la civilisation.
- Les événements se présentent depuis un discours disculpant pour le héros originaire de tel groupe dominant : le monde sauvage et lointain dans lequel il s'enfonce (incivilisé, féminin) est doté d'un érotisme mystérieux et des pouvoirs obscurs et magiques qui paralysent ses capacités.
· Les portraits sont réalisés dans un double regard d'idéalisation et de présomption d’une soumission volontaire de la part de "l’Autre" : le texte retraite l'univers de Cléopâtre et ses servantes (un monde féminin et exotique) dans une offre de soumission volontaire et admirée vers le vainqueur.
· La représentation de "l’Autre" est identifiée par des qualités du sauvage et de l'animal :
-c’est un univers conquis mais voilé, mystérieux, qui ne peut pas être connu dans sa totalité et qui garde une certaine dimension impénétrable (un trait essentiel de la femme fatale);
-c’est un univers sensuel et identifié avec une exhibition accentuée du corps de la femme : dans le texte, Cléopâtre et sa suite composent l'ensemble dans lequel le corps féminin est montré et souligné dans sa volupté au moyen des recours scéniques et musicaux comme le vestiaire et la danse;
-malgré la soumission qu'elle offre, Cléopâtre garde une autre face cruelle et violente à la marge de la morale et les limites de « la » civilisation.
3. La caractérisation de la femme « dangereuse » à partir des traits du délit et du marginal.
La femme jugée dans ce contexte comme quelqu’un digne de sanction à cause d'un schéma vital scandaleux ou des revendications inquiétantes, partage certains traits externes avec les habitants des faubourgs[51]. Ainsi ce type de figures féminines réunit dans sa caractérisation une contradiction significative d'éléments :
- d'une part, elles exhibent les signes essentiels de la sexualité de la femme d'une façon plus prononcée et impudique;
- mais, en même temps, elles montrent certaines habitudes et marques qui les présentent comme les « moins féminines » de toutes les figures qui représentaient la femme.
Chez cette Cléopâtre, ces marques de sa séparation avec le stéréotype féminin sont obtenues par deux recours essentiels :
· L’opposition déjà citée avec les attributs et les scènes vitales d'Octavie, le personnage de contraste qui incarne l'épouse idéale et qui s'identifie aux patrons de la norme, de la religiosité et de la chasteté.
· Certains traits masculins de la protagoniste, obtenus avec de significatives « habitudes et manières d'homme » :
-Elle fréquente des endroits de loisir bohémiens et marginaux, comparables avec certains cabarets du Paris nocturne.
-Dans de tels endroits, elle se déguise en homme, en profitant de son anonymat pour jouir de la sensualité de ces endroits « marginaux », des lieux « clandestins » prêts pour des rencontres de toutes orientations sexuelles.
-Les vers et les notes de mise en scène de certains personnages comme Charmione montrent que Cléopâtre exerce un pouvoir de fascination chez d’autres femmes comparables avec une sorte de soumission érotique.
Voilà un exemples très significatif de la juxtaposition confuse de questions imprimées par beaucoup d'auteurs à leurs personnages féminins : l'adoption de vêtements masculins est, dans ce contexte historique et social, l'une des marques principales de la revendication des femmes intellectuelles qui demandent une reconnaissance de leurs droits; son association présente mais subtile avec des aspects tels que le crime, la contagion vénérienne ou l'obtention de la jouissance au moyen de la destruction de l'autre, pouvait exercer une puissante influence socialisante dans la considération collective de ces pionnières de la revendication des droits des femmes.
4. La femme qui utilise son pouvoir pour jouir de la destruction de l'homme.
Conformément à l'analyse des motivations et du schéma actanciel du personnage, nous voyons dans le texte énoncé que la reine poursuit cette destruction de l'homme parce que c'est sa façon d'atteindre le plaisir. Elle n’est pas une victime des déséquilibres ou des traces d'une société : elle a un contrôle total des dangers qu'elle porte et elle les administre volontairement, en se séparant du profil de la « perdue» pour s'asseoir dans le schéma de conduite d'une assassine sadique.
Dans ce texte, nous soulignons trois marques essentielles de ce profil :
· L'ascension évolutive de Cléopâtre est symétrique à la descente du héros masculin.
· Cléopâtre calme son dégoût au moyen de jeux dans lesquels la satisfaction procède de la souffrance ou de la destruction de l'autre, comme elle montre quand elle infuse de la jalousie pour se plaire, quand elle arrive à l'extase devant la furie du peuple ou quand elle joue érotiquement avec des poisons sur le corps de ses esclaves.
· Son climax évolutif et esthétique comme personnage arrive « avec » la destruction finale de l'homme qu'elle aime, et avec une conscience exprimée « dont elle l'aime maintenant, précisément, parce qu’il est détruit ».

6. La femme dirigeante comme une « personne royale». L’analyse de la tragédie Antoine et Cléopâtre de William Shakespeare (1606).
Notre troisième analyse s’occupe de La Tragédie d'Antoine et Cléopâtre, créée en Angleterre par le dramaturge William Shakespeare en 1606. Nous détachons trois aspects qui définissent ce texte comme une élection nécessaire pour cette investigation:
1. Il s'agit de la représentation considérée, durant les quatre derniers siècles, comme la référence clef du personnage qui nous occupe, en devenant même avec le relais de Plutarque en ce qui concerne l’influence pour des lectures postérieures de la reine Cléopâtre.
2. Shakespeare est l'un des auteurs principaux à étudier dans toute investigation qui s’interroge sur les processus de création artistiques des personnages:
· Sa production théâtrale offre une galerie de mythes universels qui condensent l'une des collections les plus complètes de la représentation de l'humain à partir des personnages de fiction.
· En plus, l'oeuvre spécifique qui nous occupe se trouve dans un groupe spécial de textes où la construction de personnages, précisément, acquiert une nouvelle orientation : cette tragédie s’insère entre ces derniers travaux (comme Hamlet, Othello ou Macbeth) avec lesquels Shakespeare a participé au mouvement de la «personalisation», une nouvelle forme de concevoir la composition et l'interprétation des personnages théâtraux, projetée par le dramaturge et certains de ses collègues contemporains comme une façon moins artificielle et stéréotypée que l'esthétique théâtrale des décennies antérieures.
3. Le contexte historique et social de production de cette oeuvre fait que celle-ci, en plus, soit un exemple de grande importance pour l'analyse du personnage par rapport à la représentation culturelle de la femme de pouvoir : nous nous trouvons dans la période des monarchies absolues européennes, entre les XVe et XVIIIe siècles, une étape cruciale dans le débat sur la capacité de gouverner de la femme.
· D'une part, cette période persiste toujours à proportionner une éducation différente pour les garçons et les petites filles, renforce le mariage et la maternité comme les buts « uniques et fondamentaux » des femmes et dessine des nouvelles formules morales et juridiques (parfois même chez la modernité de l'humanisme) avec lesquelles garantir la permanence des épouses, filles et soeurs dans un niveau de dépendance.
· Cependant, cela coexiste avec d'autres réalités qui font de cette période une étape historique singulière dans laquelle des femmes de différentes strates de la société peuvent s'incorporer à la participation du pouvoir social :
-il y a des artistes rémunérées, des studieuses de la sagesse humaniste, des nouvelles gérantes et des femmes mécènes qui arrivent à devenir ambassadrices culturelles de leurs états;
-avec la fin de l'ère féodale, l'habileté traditionnelle des dames de la noblesse est revalorisée dans la compétition par le pouvoir chez les cours européennes;
-même se développent certains règnes de femmes, gouvernés par des reines comme Catalina la Grande de Russie qui substituent d'une façon permanente leurs époux ou enfants, ou pour certaines monarques telles Isabelle I de l'Angleterre ou Thérèse d’Autriche, qui accèdent au trône par un droit propre et gouvernent pendant de longues périodes.
La Cléopâtre de Shakespeare apparaît dans cette période particulière d'échange, en devenant une porteuse (voilà notre hypothèse principale) des contradictions et des réussites du débat autour de la femme et sa relation avec le pouvoir social. Que le débat soit un élément important de ce personnage est un élément qui se concrétise même dans l'interprétation que les critiques, artistes et publics ont fait, durant des siècles, autour de son profil :
· C’est un personnage complexe à interpréter, à cause de trois grands recours qui soutiennent l'établissement général de cette tragédie et qui compliquent la lecture du profil, des décisions et des motivations des sujets de la trame et, spécialement, chez Cléopâtre :
-une grande partie des personnages se meut fréquemment dans la feinte et l'ironie;
-l'auteur décide de présenter la protagoniste entourée d’un environnement de rejet et de misogynie spécialement accentué;
-les attributs de Cléopâtre composent un ensemble contradictoire, avec les caractéristiques propres d'un personnage destructif et censurable mélangées cependant avec celles d'une héroïne tragique qui émeut par son courage et son histoire d’amour.
• Peut-être grâce à cette complexité, l’étude et l’analyse de ce personnage ont eu des lectures opposées :
-ils sont beaucoup, les critiques et les analystes qui trouvent en elle le profil archétypique d'une femme fatale, destructive, fragile et incapable[52],
-mais il y en a aussi d’autres qui attendent qu'elle réfléchisse une intention plus sensible et ambitieuse de la part de Shakespeare et qu'elle soit présentée comme une héroïne noble et applaudie[53].
Les résultats de notre analyse nous situent dans ce deuxième groupe et nous conduisent à proposer l'interprétation suivante de ce personnage : son portrait la présente comme celle qui exerce un commandement le plus élevé d'un grand groupe social et qui doit lutter contre une tension constante entre sa nature personnelle (complexe, comme toutes les faces de l’être humain) et une condamnation incessante qui l'entoure. Une condamnation qui n’est pas seulement due à ce que Cléopâtre est une dirigeante mais aussi, et spécifiquement dans beaucoup des cas, parce qu’elle est une dirigeante-femme. Nous considérons que le dramaturge ébauche les éléments principaux de cette lecture avec la dernière référence que le texte fait d'elle ("being royal", une personne royale)[54] :
· La décision du texte de se fermer en définissant Cléopâtre comme « une personne », dans le débat historique à propos de la dignité des femmes et en contrastant fortement avec les autres façons auxquelles certains personnages ont substitué son nom tout au long de l'oeuvre (« égyptienne », « femme », « visage brun » ou même l'insulte « pute »), peut contenir :
-une synthèse avec laquelle parler de la complexité de l'humain, contradictoire et imparfait,
-un hommage et une reconnaissance à son égalité avec les autres personnages et héros de la trame (en dénonçant avec ce contraste la difficile exclusion à laquelle elle a été soumise jusqu'à ce moment à cause de ses différences: une monarque, une Egyptienne et, surtout, une femme).
· La décision d’ajouter l’adjectif de la royauté semble parler :
-à la grandeur et l'éclat de l'héroïne (au contraire de ce que nous avons observé par rapport aux contextes sociaux des textes de Massenet et De Mille, la royauté est un élément forcément très élevé dans le contexte social monarchique de Shakespeare),
-mais aussi à sa condition de gouvernante, un élément qui toucherait ainsi une importance très significative dans le profil de la protagoniste.
Conformément à cette lecture, nous trouvons que le profil du personnage est soutenu par trois piliers fondamentaux :
1. La tragédie de l'humain : un personnage complexe, un archétype multiple.
L'analyse de l'expression verbale, des motivations et du schéma actanciel de la Cléopâtre de Shakespeare montre une vocation accentuée de réalisme, une forte volonté de dessiner un portrait particulier qui réunit des imperfections, des contradictions et des grandeurs de l'humain. Dans ce sens, nous pouvons détacher trois recours principaux avec lesquels Shakespeare profile sa reine :
· L’élection de la période vitale la plus mûre du référant historique, caractérisée et conditionnée par deux conséquences liées :
-par une sagesse, un bagage vital et une capacité de réflexion plus forts,
-mais aussi par les effets et la préoccupation acheminés du vieillissement, ainsi que les conséquences des erreurs de toute une vie.
· L’élaboration d'un portrait basé sur des attributs, conduites et expressions contradictoires, présenté à partir de trois types de manifestations :
-les actions et les jugements sincères et volontaires (même si, dans des moments postérieurs, ils sont reconnus par Cléopâtre comme des décisions justes ou si, par contre, ils sont considérés comme des erreurs) ;
-des manifestations feintes qui cachent des motivations et objectifs différents à ceux que le personnage annonce;
-des confusions et des équivoques, résultantes de l'interaction sociale et du devenir des événements impondérables.
· La définition du profil de Cléopâtre est faite à partir d'un répertoire, des états et réactions émotives fortement contrastantes. Il y a deux aspects importants qui se détachent de l'analyse de ce recours :
-Il présente le personnage avec deux grandes motivations, défendues et exprimées avec des expressions et intensité pareilles :
- la passion de l’amour et l'implication totale dans la défense de son lien avec Antoine;
- la défense de sa dignité et de sa souveraineté sur sa propre destinée: dans un contexte historique où le débat à propos de la dignité des femmes traversé par un épisode si intense, la détermination avec laquelle Cléopâtre lutte contre toutes les tentatives de la saisir, de ridiculiser sa mémoire ou de l'exhiber comme trophée de guerre, touche une importance très significative.
-Son profil apparaît comme une combinaison atypique d'expressions, qui ne coïncident pas avec le patron demandé aux femmes mais pas non plus avec le répertoire expressif des leaders masculins de la trame.
2. La définition de la reine à partir d'un résumé complexe de nécessités et d'habiletés politiques et d’interaction
À partir de l'analyse des actions et des interventions verbales du personnage, nous trouvons chez la Cléopâtre de Shakespeare une combinaison d'habiletés qui se sépare, à nouveau, du portrait monocorde et « prévisible ». Nous nous trouvons devant le portrait de l'une de ces femmes qui, dans l'univers référentiel de Shakespeare et de son public, semblait aussi proche que la propre reine Isabelle I, une figure fortement déconcertante à l'égard des attentes associées aux deux rôles qui confluaient chez sa personne :
- celui de « femme »
- et celui de « gouvernant », dans un contexte où, selon la tradition historique et la normalité, les gouvernants étaient des hommes.
Ainsi, de la même façon que la reine Tudor, décédée seulement trois ans avant la création de cette oeuvre, Cléopâtre apparaît ici comme un être qui ne suit pas les patrons normalisés et qui agit sous un conflit tendu entre les attentes respectives des rôles féminins et masculins. Dans l’analyse de ses interventions, nous trouvons que le texte caractérise ses initiatives et son habileté avec trois éléments principaux, des aspects clés de la politique courtisane des monarchies absolues :
· La souveraineté et le contrôle de ses décisions :
-elle ne délègue pas dans d'autres figures qui substituent son leadership;
-elle ne pense pas que le devenir des événements résolve les conflits sans son intervention;
-elle n’admet pas l'exclusion de certaines scènes politiques ou de guerre à laquelle d'autres personnages veulent la soumettre à cause de sa condition de femme.
· Des habiletés communicatives et d'interaction : en suivant la chronique de Plutarque, Shakespeare développe son personnage à partir d'un ample répertoire d'habiletés et stratégies sociales:
-l’habileté aux rencontres : elle est définie par sa séduction communicative, un grand maniement des recours de la rhétorique et de la manipulation et une forte habileté pour la planification stratégique des ambiances;
-l’anticipation et la connaissance de l'état et des attentes de ses interlocuteurs au moyen de l'espionnage ou les essais stratégiques, comme phase indispensable pour planifier ses rencontres postérieures.
· L'inclusion des « pouvoirs naturels » et des fonctions traditionnelles de la femme : l'une des nouveautés du texte de Shakespeare est qu'il n'omet pas certains aspects de la biographie du référant historique qui contredisaient le portrait monocorde de la « femme non traditionnelle ». Ainsi, il inclut dans son portrait les deux éléments principaux qui définissaient, à l'époque, les missions essentielles de la femme : le mariage et la maternité de Cléopâtre, si souvent éliminés des portraits de condamnation du personnage. Cette décision de les inclure est très significative, surtout par rapport à l’importance que ces deux sujets acquéraient dans les débats nationaux ouverts autour de chacune des monarques absolues de l'époque.
3. La définition de la reine à partir d'un résumé spécifique d'obstacles et adversités
L'analyse de l'évolution du personnage, de ses motivations et de la façon dont le texte est clôturé nous conduisent à identifier la Cléopâtre de Shakespeare avec une héroïne tragique accompagnée d'une charge explicite d'hommage et de reconnaissance. Cet aspect pourrait être en conflit avec le répertoire abondant des insultes et désapprobations originaires d'autres personnages (même de la part d’Antoine dans quelques moments) avec lesquels l'auteur décide de présenter Cléopâtre. Après avoir analysé cet ensemble d'éléments et après les avoir rattachés aux manifestations similaires originaires des autres textes de l'époque ou de la propre production du dramaturge, nous trouvons quatre aspects qui nous semblent spécialement significatifs :
- ces insultes reproduisent les éléments principaux du traitement de condamnation de la « Cléopâtre pécheresse » typique du traitement monocorde médiéval du personnage;
-ces insultes sont inscrites dans le discours misogyne répandu de l'époque, principalement localisé dans l’Angleterre du XVI et XVIIe chez les groupes puritains, les ennemis manifestes du théâtre comme un porteur de contenus et d'activités sociales, avec une condamnation spéciale pour la résonance que les personnages féminins acquéraient dans les oeuvres;
- ces insultes parlent principalement de la sexualité et de l'origine de la reine, d'une façon pareille au recours utilisé par Shakespeare pour décrire l’animadversion et l'envie qu'Othello réveille dans son environnement;
- bien qu’étant identifiés par un discours misogyne quotidien et répandu, ces insultes ne se lancent pas contre Octavie, le personnage féminin de contraste avec Cléopâtre (en étant défini, Octavie, par son origine romaine, sa modération accentuée dans l'expression émotive et sa soumission avec le dangereux mariage ordonné dont elle est la victime, une pratique politique et familière que le dramaturge controverserait le long de sa production et d’une façon spéciale dans le traitement qu'il a choisi pour sa version de Roméo et Juliette).
Après avoir rattaché ces composants et les comparer au positionnement que Shakespeare adopte par rapport à tels aspects, institutions sociales et courants esthétiques, nous arrivons à la conclusion suivante :
-tel appareil d'insultes et d'obstacles sociaux contre la reine ne est pas destiné à souligner la définition que l'auteur donne au personnage,
-mais à retraiter le type d'environnement et de difficultés spécifiques que la protagoniste trouverait à cause de sa différence : Cléopâtre se distingue des autres femmes pour être leader et des autres leaders pour être femme.
Puisque le texte est clôturé par une intention manifeste de rendre hommage à son héroïne comme une maîtresse de ses destinée et souveraineté (nommée comme une « personne royale », et avec la couronne soulignée comme l’objet emblématique de sa caractérisation finale), nous concluons que la décision de Shakespeare de former un tel ensemble si insistant d'obstacles préalables, essaie d'ajouter un autre élément à son profil héroïque : Cléopâtre obtient la victoire contre telle armée des préjugés et condamnations localisés dans sa différence, et c’est pour cette raison qu’elle devient une héroïne.

7. Conclusions
Arrive finalement, le moment de rappeler les objectifs et les hypothèses de départ, et de les comparer aux résultats principaux qui, à notre jugement, condensent et différencient cette investigation une fois finie. Le déroulement et l'exposition de cette dernière phase de notre travail sont vertébrés par deux lignes fondamentales auxquelles nous voulons faire attention :
· celle qui parle de la volonté de l'intégration que nous avons poursuivie
· et celle qui se rapporte à l'objet concret de l'analyse que nous avons choisie pour la présente thèse doctorale : les représentations artistiques de Cléopâtre dans l'Occident comme un cas concret pour l'analyse comparative de définitions culturelles de « la femme de pouvoir » originaires des différents contextes sociaux et historiques.
La première de ces deux lignes se rapporte à une évaluation générale que maintenant nous pouvons faire de cette vocation de résumé et de conjugaison qui marquait transversalement notre objet investigateur, et que, sans doute, va être très présent dans la plupart de nos conclusions. Si nous lisons les objectifs et les hypothèses que nous formulions dans notre point de départ, nous pouvons détacher comme la caractéristique principale cette intention de réunir des cadres disciplinaires, méthodologiques, expressifs et sociaux qui allait conditionner cette recherche dans toutes ses phases de déroulement :
· Comme une première zone de conjonction, nous insérons notre travail dans la collaboration de trois ensembles disciplinaires fondamentaux :
-les disciplines concentrées sur l'analyse exhaustive des textes artistiques,
-les disciplines qui considèrent de telles oeuvres comme des manifestations et des documents avec lesquels étudier les groupes sociaux dans lesquels elles se produisent,
-et les disciplines qui font attention, depuis différentes perspectives de la science, à la situation et à la représentation des femmes dans les diverses sphères vitales et sociales.
· Comme un deuxième niveau de conciliation, il faut rappeler que nous voulions projeter notre travail à partir d'un objet d'analyse concrétisé dans un corpus d'oeuvres de langages artistiques très différents (des arts plastiques, la musique, la littérature, la scène, le cinéma) pour pouvoir approfondir dans ses processus de relation et d'alimentation mutuelle.
· Finalement, nous voulions que tel corpus fût aussi caractérisé pour inclure des textes représentatifs d'un ample éventail d'environnements géographiques, historiques et sociaux de production. Avec ce corpus, nous voulions réunir des textes très différents, un aspect très important pour notre analyse sociologique:
-des discours énoncés pour des groupes sociaux très divers,
-et, en conséquence, des styles esthétiques et créateurs aussi très différents (chacun avec ses propres techniques, conventions de représentation et codes iconographiques).
Rappeler ce caractère qui a orienté notre investigation nous conduit à parler nécessairement du deuxième aspect avec lequel nous allons conduire l'exposition de nos conclusions. Nous considérons que cette pluralité (des perspectives disciplinaires, des langages artistiques et des environnements sociaux et esthétiques de production) a été possible dans cette recherche grâce à la décision de guider notre travail à travers l'histoire des représentations d'un seul personnage : une figure qui semblait spécialement significative pour les différents objectifs que nous nous proposions et que, à la fois, aidait à limiter et à structurer l'application et le déroulement de notre recherche. Nous estimons opportun, comme nous venons de l’annoncer, que la référence à ces deux aspects organise l'exposition de nos conclusions finales.
Commençons par réfléchir et par évaluer les conclusions et les apports auxquels cette investigation nous conduit en ce qui concerne la collaboration entre les Sciences de la Communication et la Sociologie de l'Art et la conjonction de ses perspectives chez un modèle réuni d'analyse du personnage. Toutes ces conclusions partent, selon notre opinion, de ce premier point :
1. Les résultats de l'étude panoramique et des analyses individuelles de cette recherche confirment ce que nous avions formulé aux trois premiers buts généraux et à la première des hypothèses avec lesquelles nous initions cette thèse doctorale, en nous permettant de vérifier deux aspects cruciaux pour nous :
· en premier lieu, nos résultats nous confirment que l'investigation coordonnée de ces disciplines est pertinente, efficace et enrichissante ;
· en deuxième lieu, l'application de tel modèle nous conduit à évaluer que l'exhaustivité analytique projeté dans chacune des deux perspectives (textuelle et sociologique) conduit au bénéfice mutuel (et non à la débilitation de ses processus respectifs à cause d’un certain déterminisme de la recherche).
De cette première évaluation générale se détachent une série de conclusions qui répondent aux aspects spécifiques de notre perspective disciplinaire et méthodologique :
2. En faisant attention à la segmentation spécifique avec laquelle nous avons structuré nos analyses du personnage dans le texte (sa caractérisation externe, la construction corporelle et vocale, le discours musical …) nous trouvons que l'examen de chacun de ces niveaux de signification et d’énonciation (d'abord isolé et tout de suite comparé) nous conduit à trois aspects clefs pour l'analyse que nous nous proposions :
· identification des composants intentionnels mais voilés qui pouvaient passer inaperçus sur la surface du texte,
· clarifier jusqu'à quel point l'oeuvre insiste sur certains énoncés (qui peuvent être affermis par le rôle conjoint de divers canaux),
· détecter certains points subtils de contradiction qui peuvent devenir très importants pour l'analyse complète du personnage.
3. Cette attention individualisée aux catégories de notre modèle accomplit aussi un rôle efficace dans le déroulement de la phase comparative de l'analyse, en facilitant le contraste des oeuvres réalisées à partir des langages expressifs très différents. Les résultats de nos analyses répondent à l’objectif numéro 5 avec l'approfondissement dans des cas spécifiques d'alimentation et de l'apprentissage établis entre quelques arts. Cette perspective de recherche nous a permis d'identifier certaines influences comme les suivantes :
· l’influence exercée par le genre théâtral pendant la Renaissance et le Baroque (un univers spécialement actif dans le renouvellement de l'image sociale de la femme) en soutenant une représentation généralisée dans les arts picturaux et sculpturaux de la Cleopatra noble après l'avoir présentée dans les scènes comme héroïne tragique;
· ou celle que nous détectons dans la construction corporelle et mélodique de la Cléopâtre de Massenet et Payen, décrite dans sa relation avec d’autres femmes à partir de certaines postures et des attitudes d'insinuation homosexuelle utilisées par les peintres et les illustrateurs de l'époque pour retraiter les personnages associés à l’imaginaire féminin oriental.
4. La comparaison entre les différentes représentations d'un personnage produites dans le même environnement social et le contraste postérieur des corpus originaires de contextes différents, sont des tâches de recherche qui coopèrent dans l'une des phases méthodologiques avec laquelle mieux approfondir dans l'analyse textuelle et sociologique de la figure citée. Par rapport aux objectifs 8 et 9, nous considérons ainsi qu’elle le démontre, notre étude panoramique et la manière dans laquelle celle-ci nous a permis de choisir les textes les plus appropriés aux analyses individuelles et d'encadrer et d'interpréter plusieurs de leur éléments constitutifs : on peut choisir comme exemple de ce processus la construction que Massenet et Payen ont faite de la Cléopâtre fatale par rapport aux représentations de Pushkin, Gautier, Cabanel ou Fokine (des héritières, à son tour, de la vision instaurée par la politique de propagande d'Octavie dans le Ier siècle av. J.C), une comparaison qui permet non seulement d'interpréter avec un plus grand bagage les traits de chaque exemple individuel, mais aussi d’obtenir des informations importantes à propos de la relation que telles représentations ont avec leurs publics.
5. Un autre des outils principaux avec lesquels approfondir l'analyse de la construction textuelle et contextuelle du personnage a été la comparaison entre :
-les caractéristiques avec lesquelles les artistes du même environnement profilent ce personnage spécifique
-et les traits d'autres figures importantes dans le même imaginaire collectif (des personnages originaires de la mythologie, la littérature, l’histoire ou la réalité sociale contemporaine).
En rattachant les résultats de nos quatre chapitres d’analyse, nous pouvons vérifier que cette phase de notre recherche nous a permis de détecter une ligne importante d’évolution de la définition collective de notre personnage étudié. En analysant d’autres figures avec lesquelles chaque groupe social a associé ce personnage, nous avons pu définir et classer une grande partie des oeuvres qui composent notre corpus artistique. Ainsi, nous sommes arrivés aux conclusions spécifiques suivantes, très significatives pour l’analyse sociologique:
· dans son Égypte contemporaine, Cléopâtre était associée à Isis et Hathor, des symboles de la maternité et de l'abondance, des dimensions positives du pouvoir associé à la femme;
· la Rome gouvernée par César, était associée à la déesse Venus;
· dans les campagnes octaviennes, elle est devenue le visage principal des groupes ennemis de la République;
· au Moyen Âge, elle est principalement associée à Ève et les sorcières, des images essentielles du péché et de la condamnation féminine;
· à partir du théâtre de la Renaissance et du Baroque, elle est identifiée avec certaines des figures clefs de la galerie historique des « femmes fortes », telles que Lucrèce ou Sofonisbe; les artistes ont même filtré dans les vers de la nouvelle Cléopâtre des phrases d'extraordinaire similitude avec les discours de certaines reines absolues ou des dames de la « querelle des femmes», comme Isabelle I de l'Angleterre ou Christine de Pisan;
· l'univers du XIX siècle a recommencé à l'associer collectivement aux figures représentatives de la sorcière, la séductrice et la destructrice de l'homme comme de Circe, Salomé ou la contemporaine Mata Hari.
6. Ce travail de comparaison se rattache à l'analyse des structures archétypiques autour desquelles telles figures de traits partagés pouvaient être groupées par le regard des artistes et du public. Notre étude panoramique peut se joindre et servir d’appui aux futures recherches qui partent de la considération selon laquelle, comme nous l’exposions dans notre cinquième hypothèse, la définition sociale de la femme de pouvoir tend à projeter une certaine réunion de discours autour des profils archétypiques. Par rapport à cet aspect, nous avons localisé et classifié les oeuvres de notre corpus autour de définitions comme les suivantes :
· la femme dirigeante présentée comme la « grande mère du peuple », comme le symbolise la politique artistique pharaonique ou celle de certaines reines absolues comme Isabelle I ;
· la femme de pouvoir présentée comme « l'usurpatrice du lieu de l'homme » (telle, elle semble être la devise des auteurs romains, des enlumineurs médiévaux et des auteurs de l'univers du XIX siècle),
· la femme gouvernante vue comme une leader capable (comme nous le voyons dans les textes abondants des trois dernières décennies).
7. Cependant, cette association entre les représentations et les archétypes n’a pas toujours été immédiate ni indubitable. Comme nous prévoyions dans notre huitième hypothèse, une grande partie de ces textes profilent leur personnage conformément à un réseau complexe d'attributs qui, seulement après l'analyse de chaque canal de signification, permet une certaine localisation dans un patron archétypique et pas dans un autre. Dans ces cas, notre recherche a dû se risquer à proposer ces résultats en sachant que les autres théoriciens et annalistes les ont même interprétés d'une manière opposée : on trouve un des cas les plus clairs chez Shakespeare, dont la réinterprétation constante théorique et scénique pourrait servir, par soi-même, comme objet d'une analyse à propos de l'évolution du regard social de la femme.
Ces dernières observations nous conduisent à considérer les aspects relatifs au quatrième objectif général et la deuxième hypothèse avec lesquels nous définissons le point de départ de notre investigation :
8. Compte tenu de la visibilité peu abondante que la population féminine acquiert dans les chroniques et les oeuvres historiographiques de certaines périodes, nous entendons que la conjonction disciplinaire défendue par cette investigation semble spécialement opportune dans le cas des recherches autour de la situation et la considération sociales des femmes le long de l'Histoire. Comme nous avons pu le vérifier dans notre étude panoramique (et surtout, dans les premières parties de celle-ci) certaines représentations artistiques de femmes sont, dans quelques périodes, les principaux documents porteurs de la définition sociale de telles figures. Avec l'analyse de certains personnages spécialement représentatifs de ce type de discours, nous pouvons accéder à une série importante d'énoncés à propos des aspects fondamentaux pour la population féminine : dans cette investigation nous choisissons d’analyser un exemple de la représentation de la femme avec un fort pouvoir politique et social et, à partir de son analyse, nous avons pu détecter et rattacher des énoncés importants qui, dans des environnements sociaux très différents, définissent et conditionnent la participation et la représentation des femmes dans la gestion sociale et, par conséquent, dans le gouvernement de leurs propres vies. Si les femmes de la civilisation romaine, pour citer un exemple, ne devaient pas avoir un accès facile aux textes des philosophes et des moralistes de leur temps, il est certainement plus facile de pouvoir apprécier la condamnation sociale de la reine étrangère à partir des caricatures de propagande formées dans des images décoratives et des objets d'usage domestique.
Pour arguer ce point nous devons exposer notre contribution autour des conclusions spécifiques suivantes, acheminées de celles que nous venons d'énoncer et déjà formulables d'une façon plus directe par rapport à notre objet concret de l'analyse :
9. Nous considérons que l'analyse de notre corpus de représentations artistiques vérifie d'une façon satisfaisante ce que nous projetions avec les hypothèses 4 et 7 : après cette recherche, nous pouvons confirmer qu'il est possible d'approfondir dans l'analyse comparative de la définition de la femme-leader soutenue par des différents contextes culturels à travers l'analyse des représentations artistiques d'un seul personnage représentatif de tel profil. On peut considérer que la deuxième partie de cette thèse doctorale démontre que le corpus choisi (les représentations artistiques de Cléopâtre) contenait les conditions requises nécessaires pour aborder d'une manière satisfaisante la recherche et les questions de cette investigation : le long de l'analyse des traits que le personnage adopte dans des oeuvres différentes, nous avons trouvé un résumé spécifique de discours à propos du lieu social des femmes et de sa relation avec le pouvoir et le leadership. Ces discours sont originaires de théories philosophiques ou religieuses (comme celles d'Aristote ou Saint Thomas d'Aquin qu’on a dû analyser par rapport aux textes romains et médiévaux) ou des débats pédagogiques et politiques (comme ceux qui sont soutenus autour de la «querelle des femmes», l’ascension polémique de certaines des reines absolues ou la reconfiguration du travail de l'Occident entre la Première et la Deuxième Guerres Mondiales).
L'abondance des oeuvres destinées à la représentation de Cléopâtre nous confirme qu'il s'agit d'une figure de présence extraordinaire dans l’imaginaire collectif des environnements très divers. En fait, il s'agit d'un motif très valorisé par des auteurs particulièrement habiles et récompensés à l'heure de devancer et de répondre aux attentes du public et, en plus, dans les périodes créatrices de plus grande maturité et connaissance de son métier (c’est le cas des Cléopâtres de Shakespeare, Alma Tadema, Cabanel, Sardou, Massenet ou Mankiewicz). En plus, le fait que de telles abondances ne montrent pas du tout une série de portraits homogènes qui priment les mêmes caractéristiques du personnage, nous amène à considérer que l'histoire de ces représentations sert l'illustration d'une évolution de la pensée, détectée entre les groupes qui maintiennent ce personnage dans l’imaginaire collectif mais « en réinventant » son profil chaque fois : bien que le personnage nourrisse des éléments constants (son nom et son rang), les différents textes composent des portraits qui soulignent des aspects très différents, comme ils peuvent l’ être, les épisodes d’amour et sexuels, le caractère entreprenant, l'ambition politique ou un certain caractère pionnier en ce qui concerne la conduite des femmes.
10. Il est nécessaire de rattacher cette dernière conclusion à la manière spécifique par laquelle nous avons pu réaliser ce travail. Si nous nous sommes proposés de compiler et de connaître « le » corpus d'oeuvres qui, dès le Ier siècle av. J.C jusqu'aux fins de la première décennie du XXIe siècle, ont représenté ce personnage dans l'environnement occidental, nous devons admettre maintenant que telle entreprise a été seulement satisfaite en partie. Même en partant d'une situation dans laquelle nous pouvions déjà identifier des représentations importantes de ce personnage et prévoir l'ensemble étendu d'oeuvres plastiques, musicales, littéraires et cinématographiques sur Cléopâtre, nous n'imaginions pas cependant que, dans chacun de ces univers artistiques, la grandeur de l'ensemble allait être celle qu'après nous avons eu à manier. Nous devons affronter donc que nous n'avons pas trouvé certaines oeuvres importantes et qu’une partie des partitions, tissus ou films a été perdue ou reste anonyme dans des recueils et des dépôts particuliers : nous manquons, donc, de l'information que ces analyses nous pourraient avoir proportionnée. Cependant, le résumé que nous avons pu réunir est suffisamment abondant et varié pour offrir une illustration des environnements esthétiques et sociaux très différents et très intéressants pour l’étude sociologique de la définition collective des femmes :
· la propagande de la fin de la civilisation pharaonique et l'apogée de l'Empire Romain,
· la cour des monarchies absolues européennes,
· la culture populaire des grandes capitales occidentales au début du XXe siècle,
· les cadres émergents de la révolution sexuelle de la décennie de 1960 ou autour des discours de l'orgueil noir de la communauté afro-américaine.
11. En confirmant ce que nous formulions dans notre troisième hypothèse, c'était une recherche pointée sur des éléments montrés au travers du personnage qui pouvaient aussi apparaître dans d’autres expressions importantes des collectifs imaginaires de ses environnements. À travers notre analyse, nous vérifions que la localisation géographique et historique spécifique du personnage n'a pas empêché que les artistes forment autour de la reine égyptienne des discours et des traits symptomatiques de leur contexte social contemporain. Ces éléments sont localisés dans le portrait principal de la reine (ses attributs clefs et son schéma actanciel, par exemple) et à travers des aspects périphériques de sa définition (la manière par laquelle les autres personnages le retraitent ou sa relation avec certains éléments de l'atrezzo ou de la scène).
· Entre les premiers exemples, nous avons analysé dans notre étude panoramique comment la princesse évoquée par des auteurs comme Margaret George reproduit le curriculum idéal des étudiantes américaines et européennes du XXIe siècle.
· Dans le deuxième groupe, nous pouvons souligner des exemples tels que la façon dans laquelle Carmiana et des Iras décrivent sa relation avec Cléopâtre chez Shakespeare (un portrait des ambitions et des possibilités de la nouvelle classe de courtisanes née après la chute du régime féodal) ou l'insistance avec laquelle De Mille entoure sa Cléopâtre d'éléments significatifs de l'esclavage (en coïncidant avec la proximité qui a été faite aux États-Unis entre les premières demandes de liberté politique pour les femmes et les droits de la communauté noire).
12. Il nous reste à répondre à celle que nous formulons comme sixième hypothèse. Ces différences entre la manière par laquelle les textes profilent le personnage à partir de la sélection d'anecdotes biographiques, de certains traits physiques et conduites ou de certaines motivations, semblent garder une relation étroite avec la façon avec laquelle les femmes participent dans la gestion sociale de leurs contextes sociaux: dans notre étude panoramique nous détectons que les Cléopâtres sont plus abondantes, studieuses, sincères, indépendantes et profondément réalisées au travers de « leur travail », par exemple, quand le marché occidental trouve, depuis la décennie de 1970, un secteur important du public féminin qui demande des personnages avec ce patron et qui pourrait avoir un intérêt particulier de trouver des portraits dignes et beaux de femmes gouvernantes.
Le long de cette étude nous avons détecté que ce facteur pourrait aussi être lié à la propre situation et l'idiosyncrasie personnelle de celui qui crée l'oeuvre d'art : l’exemple que nous venons de citer coïncide aussi avec la période dans laquelle on trouve le groupe le plus grand des femmes qui s'incorporent à la création artistique avec du succès commercial et du prestige social et, par rapport au cas qui nous occupe, à créer des portraits de la reine Cléopâtre. Faut-il supposer que peut-être, ces auteurs sont celles, qui ont créé la nouvelle lecture d'une héroïne antérieurement profilée à partir des archétypes négatifs ? Certainement, des femmes de lettres comme Xenakis, Dufour, Margaret Georges ou Boullosa répartissent l'intention de réinterpréter le personnage, en lui donnant de beaux traits qui l'apparenteraient avec un certain portrait idéal de la femme de la fin du XXe siècle et des principes du XXIe. Et il est certain aussi que si nous cherchons dans les référents artistiques que telles auteurs auraient dans les premières étapes de l'histoire des représentations de Cléopâtre, nous trouverions des femmes artistes isolées et remarquables qui, dans leurs environnements respectifs, ont pu vivre de leur création et qui coïncident avec l'image sanctifiante et de défense de la reine égyptienne : il paraît que dans les portraits signés par des femmes peintres comme Artemisia Gentilleschi, Lavinia Fontana, Elisabetta Sirani et Angelika Kauffmann ou les sculpteurs Harriet Hosmer, Margaret Foley y Edmonia Lewis, l'humanisation, la noblesse et l'élégance de la reine sont des traces prioritaires. Mais, après notre analyse comparative nous croyons que si les propositions de ces auteurs doivent être analysées comme des contributions importantes (même des pionnières) de l'évolution de la représentation de la « femme Cléopâtre » (et « femme puissante », entre ses attributs principaux), sa projection collective collabore nécessairement avec les représentations faites par certains hommes : des écrivains, peintres, sculpteurs et cinéastes dont les lectures de Cléopâtre répartissent des traits importants avec celles faites par des femmes. L'une des conclusions principales auxquelles cette étude nous conduit consiste en ce qu'elle démontre que l'efficacité de l'évolution de ce corpus (et de certains discours illustrés par lui) réussit seulement avec l'implication conjointe des hommes et des femmes. Les Cléopâtres de Gentilleschi sembleraient prononcer les mots de l'héroïne de Shakespeare, l'humanité cherchée par Xenakis coïncide avec le portrait de Moix, l'intelligence que Georges accentue dans son évocation est aussi celle que Mankiewicz a revendiquée pour sa reine égyptienne, et le caractère entreprenant et brillant avec lequel Boullosa l'imagine se marie avec le profil aventureux et visionnaire avec lequel aussi Kelley choisit de la décrire.
Arrivés à ce point, nous voudrions réitérer notre conviction dans la nécessité de poursuivre avec les études à propos de la façon avec laquelle nous, les divers groupes sociaux, retraitons certains rôles importants comme celui que nous avons choisi. Par cela, nous voudrions continuer les lignes commencées dans cette investigation à partir de deux lignes futures d'analyse comparative :
· l'application du modèle analytique et le processus ici proposés à l'analyse de l'autre type de rôles et des personnages féminins de fiction spécialement éminents dans cette relation que les récits ont avec notre lecture (et notre réécriture) du monde qui nous entoure et les relations sociales qui l'organisent;
· de la même façon, et en revenant au sujet concret qui a occupé cette recherche (la représentation de la femme de pouvoir) nous voudrions étendre le processus analytique que nous avons développé dans cette recherche à l'étude de femmes de notre Histoire et notre réalité contemporaine qui dégagent un rôle particulier dans l'échange vers une distribution plus équilibrée et enrichissante de la participation d'hommes et femmes dans les institutions qui gouvernent nos sociétés.



























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[1]Ruspini, 2002, p. 18.
[2] Dans la version complète de cette thèse doctorale on peut trouver de brefs commentaires adjoints qui complètent la première énonciation de chacune de ces hypothèses.
[3] Eco, 1955, p. 35.
[4] Eco, 1992, p. 69.
[5] Gubern, 2002.
[6] Alexandre, Smith et Sherwood : « la Théorie et la méthode dans les études culturelles », chez Alexandre, 2000, pp. 128-129.
[7] Passeron, 1986, p. 449, cité chez Péquignot, 1991, pp. 39 et 40.
[8] Alexandre, Smith et Sherwood : « La Théorie et la méthode dans les études culturelles », chez Alexandre, 2000, pp. 132.
[9] O’Leary et Flanagan, 2001, p. 645.
[10] O’Leary, 1974 et 2001; Eagly, Johnson, Karau et Makhijani, 1990, 1991, 1992 et 1995 (chez O’Leary et Flanagan, 2001, p. 645-656). Voir aussi : Gutek (1981), Tanton, 1994; Walsh, 1997; Maccoby, 1998; Cleveland, Stockdale et Murphy, 2000.
[11] Aumont et Michel, 1990, p.48.
[12] Propp, 1928 : édition de 2001, pp. 115 et 116.
[13] L'exposition détaillée de chacune de ces parties de notre modèle se trouve dans la version originale complète de cette investigation.
[14] Péquignot, 1991, p. 55.
[15] Propp, ed. 2001. p. 99.
[16] Bordwell, 1985, p. 15.
[17] González Requena, 2006, p.527.
[18] Gubern, R., 2002, p. 8.
[19] Péquignot, 1991, p.15.
[20] Geertz, 1983, p. 118.
[21] Monterde, Forêt et Solá, 2001, p.69.
[22] Michael Baxandall, 1978, pp. 53-60.

[23] Panofsky, 1979, p. 32.
[24] Geertz, C., 1983, p. 120.
[25] Duby et Perrot, édition de 2006, vol. 1, pp. 29 et 30.
[26] La version complète de cette investigation inclut une annexe avec les références de toutes les oeuvres qui conforment le corpus artistique que nous avons été capables de réunir et que, dans un plus grand ou moindre degré d'exhaustivité, nous avons considéré pour l'élaboration de cette analyse.
[27] Nous laissons pour des recherches futures la comparaison exhaustive de la représentation que ce personnage a entre les imaginaires occidentaux et orientaux
[28] Nous nous rapportons aux sculptures de Cleopatra conservées dans le Musée Hermitage de Saint-Pétersbourg et le Metropolitan de New York (inv. 89.2.660), les façades du temple d'Isis-Hathor à Dendera et les trois stèles datées autour de 51 av. J.-C. où le nom de la jeune fille accompagne le portrait d'une personne habillée de pharaon.
[29] Boyer, 2004, p. 26; Chappaz, 2004, p. 16.
[30] Apiano, des Guerres Civiles, un IIe; Dión, LI, 22, 3 (Chauveau, 2000, pp. 47 et 115); Pérez-Juana, 2005, p.138.
[31] Le rôle des historiens romains occupe une place très éminente dans la représentation de ce personnage, puisque ces chroniques ont servi comme source principale de documentation aux artistes des périodes postérieures, même jusqu'au XXe siècle.
[32] Plutarco, la Vie d'Antoine, 27-29, cité dans Chauveau, 2000, pp. 127-129.
[33] Boyer, 2004, p.32.
[34] Hauser, 1998; Vias Mahou, 2000, p. 23.
[35] Boyer, 2004, p. 32.
[36] Richard-Jamet, 2004, p.50.
[37] Wells-Cole, 1997, p.247.
[38] Pushkin, 1824, citée dans Peck, 2004, p. 246 (le souligné est à nous.
[39] Delamaire, 2004, p. 269; Quand les femmes prennent le pouvoir, monographie de la revue française Les Collections de l’Histoire nº34 (janvier - mars 2007.
[40] Daix, édition de 1981; Pernoud, 1963, Benoist-Méchin, 1996; Bedman, 2003; Le Daly, 2005.
[41] Kauffmann, 2007, pp. 24 et 25, dans Le Monde du 8 mars 2007.
[42] Royster, 2003, p. 5.
[43] Quelques pays européens, comme la France, l'Italie, la Suisse ou la Bulgarie, n'accepteront le suffrage féminin qu’après la Deuxième Guerre Mondiale
[44] Williams, 1977, pp. 3-6.
[45] Condé, 2004, p. 75.
[46] Bauër, H : critique de Thaïs dans "L’Écho de Paris" du 18 mars 1894; Duret-Hostein, É. : critique de Thaïs dans "La Patrie" du 18 mars 1894.
[47] MacClary, 1992, p. 41.
[48] Bernheimer, 1989, p. 88.
[49] Anderson et Zinsser, 1992, pp. 27-124.
[50] Said, 2003.
[51] Sand dénonce les difficultés de réalisation de la femme dans un monde hostile à ses revendications et droits, et propose son association avec d'autres "parias" de l'époque à la recherche d'une victoire commune (Consuelo, 1861).
[52] Granville-Barker, éd. 1999, p. 4.
[53] Bonnefoy, 2002.
[54] Shakespeare, éd. 1972, V, 2, p. 1836.